Trois ans et plus de quatre mois déjà que le Congolais Roger Lumbala wa Tshitenge croupit dans une prison à Paris et le traitement de son dossier n’avance pas correctement. Si c’était en République démocratique du Congo, les « nyionsotivores » congolais (experts en tout et en rien) allaient crier à une « justice malade ». Mais ici, ça se passe dans un pays de veille démocratie où les droits d’un citoyen au procès équitable, congolais soit-il, sont bafoués malheureusement par une lenteur judiciaire inexplicable dans un dossier dépourvu de pièces d’accusation. Bien que la justice congolaise ait sollicité l’extradition de ce dernier pour être jugé au Congo, le Parquet français fait fi. Ce qui inquiète son avocat français, Me Philippe Zellers qui, d’ailleurs dénonce l’incompétence de la justice de son pays dans cette affaire. Y a-t-il anguilles sous roche ?
En effet, arrêté le 2 janvier 2021, sur le fondement des dispositions de l’article 689-11 du code de procédure pénale français, Roger Lumbala a été mis en examen des chefs de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime contre l’humanité et de complicité de crime contre l’humanité autre que le génocide, commis en RDC du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2003. Et depuis cette date, il est placé en détention provisoire en France, sans aucun procès le confrontant l’organe de la loi, son accusateur.
D’après son avocat français Philippe Zellers, le procès de Roger Lumbala pourrait intervenir entre novembre et décembre 2025 selon la décision du magistrat instructeur qui a, le 6 novembre 2023, ordonné le non-lieu partiel et renvoyé le reste du dossier devant la Cour d’assises qui devrait siéger pendant plus d’un mois vers la fin de l’année prochaine.
Contre cette décision qui l’oblige à passer encore une année et demi en prison sans aucune action judiciaire, Me Philippe Zellers a formé le pourvoi en cassation contre cette ordonnance devant la Cour d’assises. L’audience de cassation est prévue pour la fin de ce mois de mai en cours. Mais en attendant la suite, Me Philippe Zellers dénonce déjà et sans cesse l’incompétence des juridictions françaises et le conflit de souveraineté dans ce dossier de Roger Lumbala.
« La compétence des juridictions françaises pour poursuivre et juger une personne étrangère soupçonnée d’avoir commis, à l’étranger, sur des ressortissants étrangers certains crimes, est soumis, selon le code de procédure pénale français (art. 689-11) à un principe de subsidiarité : celui tiré du fait qu’aucune juridiction internationale ou qu’aucun autre Etat n’ait initié de poursuites contre la même personne, pour les mêmes faits. Afin de respecter ce principe, le ministère public français doit notamment vérifier qu’aucun autre Etat n’a demandé son extradition », explique l’avocat de Roger Lumbala qui fait déjà valoir que le ministère public français n’a jamais vérifié, en particulier auprès des autorités congolaises, l’existence d’une demande tendant à l’extradition ou à la remise de ce dernier à raison des mêmes faits. Or, fait-il remarquer pertinemment, les autorités françaises étaient destinataires, en 2013, d’une demande d’extradition de Roger Lumbala formulée par la justice congolaise.
Autrement dit, l’avocat soutient qu’il existe un dossier judiciaire ouvert en RDC en matière pénale contre Roger Lumbala et que ce dossier porte sur divers chefs d’infraction dont ceux pour lesquels ce dernier est poursuivi en France. Différents actes de procédure ont été lancés aux parquets inférieurs fonctionnant dans les provinces en vue de recueillir des témoignages et de rassembler des preuves. Aussi, il existe une demande d’extradition de Roger Lumbala adressée en 2013 par les autorités congolaises aux autorités françaises, demande qui serait renouvelée en vue de la poursuite de l’instruction.
« A l’évidence, la question de la compétence de la justice française pour poursuivre et juger Roger Lumbala suscite un conflit entre la France et la RDC qui conduit à s’interroger, de manière sérieuse, sur les conditions dans lesquelles les prescriptions du code de procédure pénale français ont été mises en œuvre et la souveraineté de la République démocratique du Congo respectée. Autrement posé, la demande d’extradition de monsieur Roger Lumbala, dès lors qu’elle existe, fait obstacle au mécanisme de la compétence universelle des juridictions françaises », argumente l’avocat de l’ancien député national et président du parti RCD-N, concluant et martelant que la justice française est incompétente pour juger Roger Lumbala.
Sur ce dossier, Roger Lumbala plaide non coupable et charge Jean-Pierre Bemba (Lire l’article de Scooprdc.net publié le 18 mai 2021 : Crimes en Ituri : Roger Lumbala charge Jean-Pierre Bemba devant les juges français !). Il a dénoncé l’utilisation de l’ONG Justice plus pour le charger (lire les articles de Scooprdc.net : Dossier judiciaire de Roger Lumbala en France : L’ONG justice plus a recruté 4 faux témoins à charge ! et Dossier judiciaire de Roger Lumbala à Paris : L’ONG Justice, cheval de Troie ! )