Intervenant à RDC-Africa Business Forum ce mercredi 24 novembre 2021, le ministre des finances, Nicolas Kazadi a exposé sur l’impact macroéconomique que peut avoir l’implantation d’une usine de fabrication des batteries électriques en RDC.
L’homme de chiffres, il fait d’abord observer par exemple que pour produire 100.000 tonnes de précurseurs des batteries, il faut en moyenne 16.000 tonnes de cobalt, 48.000 tonnes de nickel et 15.000 tonnes de manganèse. Le coût d’investissements pour ces 100.000 tonnes des précurseurs des batteries électriques est estimé à 301 millions USD.
Illustrant l’impact de ce projet sur la production de 100.000 tonnes des précurseurs en RDC, l’argentier congolais estime que si une telle usine avait été mise en place en 2022, on consacrerait 10% de la production du cobalt congolais à l’industrie locale.
« Ça veut dire que les 16.000 tonnes de cobalt sortiraient de la production primaire et entreraient dans ce que l’on appelle l’industrie. Et c’est tout l’intérêt de l’exercice, c’est justement de transformer l’économie pour accroître la part de l’industrie par rapport au secteur primaire. 16.000 tonnes de cobalt récupérées sur la production locale, 48.000 tonnes de nickel essentiellement importées à l’heure actuelle, et le pays d’origine serait, bien entendu le Madagascar qui est l’un des producteurs aujourd’hui et 15.000 tonnes du manganèse essentiellement importées à l’heure actuelle, et le Gabon pourrait en être le pays d’origine. La combinaison de ces trois produits pourrait donner lieu à un chiffre d’affaire d’environ 3 milliards 200 millions d’USD pour un coup de production de 200 milliards 600 millions. Mais les effets d’entraînement de ce processus de transformation se feraient dans plusieurs secteurs en amont et en aval et tout cela pourrait apporter une hausse du taux de croissance de l’économie congolaise d’environ 3 à 4 %. Ça voudrait dire que si nous avions cette usine aujourd’hui dans les conditions actuelles du pays, nous projetons, pour l’année prochaine, un taux de croissance de 6,4%, nous l’aurions eu uniquement grâce à cette usine, un taux de croissance de 9,1%. Également, si nous avions eu cette usine maintenant, l’année prochaine, la part de la croissance du PIB qui viendrait du secteur minier, serait beaucoup plus faible au profit de la part du secteur minier qui vient de l’industrie, c’est-à-dire, la transformation. Et comme cela a été bien dit, le secteur minier est un des piliers qui créent de l’emploi dans le secteur de l’économie. Alors que lorsqu’il s’agit de l’industrie de la transformation, la création d’emplois est du moins plus importante. Et nous aurions eu pour cette sorte d’usine, 875 emplois directs et des milliers d’emplois indirects. Mais des emplois qualifiés, des emplois avec un contenu réel, des emplois transformateurs », explique-t-il.
Et de renchérir : « Dans cette hypothèse, la part de la croissance du PIB qui viendrait du secteur minier chuterait de 10 % à 4,9 %, alors que la croissance du secteur (….) passerait de 4,9% à 11%. De la même manière, nous amortirions réellement notre transformation structurelle. La part du secteur primaire serait en réduction de 48 à 45 % la part du secteur secondaire en accroissement 14 à presque 17 % et la part du secteur tertiaire, 37,6 à 38,2. Également, nous aurions rendu notre économie un peu plus solide parce que nous serions en accroissement du compte courant de l’économie, c’est-à-dire la balance de paiement et également la balance commerciale. Mais ce qui est également très intéressant parce que nous le disons tous les jours et nous sommes engagés dans la zone d’échange continentale africaine, c’est qu’il y a un consensus au niveau africain pour dire que si le commerce intra africain était plus important, cela non seulement contribuerait à réduire la pauvreté beaucoup plus vite, mais cela contribuerait davantage à apporter plus de stabilité parce que les populations seraient réellement occupées dans les industries, dans la transformation, et dans les échanges du commerce, et ce serait une contribution à la stabilité du continent, à la réduction des tensions, des crises et des guerres. Et ce projet de transformation va dans cette direction ».
L’impact de l’implantation de cette usine de transformation l’est aussi, selon Nicolas Kazadi, sur le COMESA. Rien que par le fait que la RDC a importé des produits importants des pays qui, aujourd’hui, ne sont pas dans le radar dans ses importations, notamment le Madagascar, elle va accroître le commerce intra COMESA de 16% et au sein de la SADC, elle va accroître le commerce de 5,6%. Elle va également améliorer les débouchés. « Pour les introduire dans la finalisation des batteries, éventuellement le Botswana, le Maroc ça a été dit ; et donc, nous allons accroître la capacité de commercer entre africains et accroître la part du profit de la valeur ajoutée qui reste sur le continent, qui reste en salaire africain, en profit africain, en impôt africain. Voilà tout l’intérêt d’amorcer cette transformation structurelle, voilà en quoi l’événement d’aujourd’hui a un caractère historique parce qu’il est potentiellement celui qui peut changer la donne et nous permettre de passer de la parole aux actes, de la théorie à la pratique et amorcer cette transformation structurelle de l’économie. En terme fiscal également, le bénéfice serait rien qu’avec ce projet et ses effets induits un accroissement de l’impôt de l’ordre de 15 % », argumente-t-il.
Mais grâce à ce projet et à ses effets, d’après les prévisions faites à l’horizon 2025, si ce projet est implémenté maintenant, le taux de pauvreté passerait de 59 à 50 % et le nombre de pauvres baisserait, passant de 53 à 52 millions de pauvres. Et donc, la première fois, on pourrait accélérer la lutte contre la pauvreté et avoir un impact réel sur les pauvres, selon Nicolas Kazadi.
Dernier effet de ce processus, c’est que grâce à l’augmentation des revenus et de l’élargissement des perspectives, le secteur minier aurait certainement un effet d’entraînement sur les autres secteurs, étant donné que le message souvent donné lorsqu’on entre dans l’industrie de transformation, est celui de stabilité, de durée, de long terme. « Et donc, d’autres types d’investisseurs seraient plus en même de venir et d’investir dans le pays y compris dans l’agriculture et dans l’agro-industrie », soutient l’argentier congolais.