Goma : La plateforme de l’opposition rwandaise P4  dénonce un nettoyage ethnique ciblant les Hutus par le M23-AFC

La ville de Goma, en République démocratique du Congo (RDC), a été le théâtre d’une opération choquante orchestrée par le mouvement rebelle M23-AFC dirigé sans aucun doute maintenant par l’ancien président de la République, Joseph Kabila, et soutenu par Kigali. 

La plateforme de l’opposition rwandaise P4 accuse le régime de Paul Kagame de mener une politique de nettoyage ethnique contre les populations Hutu congolaises, sous prétexte de « sécurisation des frontières».

Un rassemblement forcé au stade de l’Unité

Les images sont glaçantes : 181 personnes, hommes, femmes et enfants, alignées au stade de l’Unité à Goma, sous la garde armée du M23.

Selon les témoins et les rares journalistes présents, ces personnes ont été publiquement désignées comme « citoyens rwandais vivant illégalement sur le sol congolais ». 

Pourtant, tous détenaient des papiers d’identité congolais, confisqués et brûlés sur place. 

L’un d’eux aurait crié : « Nous sommes nés ici, nos parents aussi. Où allons-nous maintenant ? »

Le M23, rébellion historiquement active dans l’est du Congo, est largement reconnu comme un groupe armé soutenu par les Forces de défense rwandaises (RDF).

 Son porte-parole, Willy  Goma, a justifié cette opération comme une mesure de sécurité nationale. Mais pour de nombreuses organisations de la société civile, il s’agit d’une manœuvre de déportation ethnique sous couvert de régularisation.

Une chasse à l’homme prolongée 

Dans les jours qui ont suivi, les rafles se sont intensifiées. Le 17 mai, au moins 360 personnes supplémentaires, majoritairement des femmes et des enfants Hutus, ont été vues embarquées de force dans des bus en direction du Rwanda. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des visages hagards, des enfants pleurant, et des militaires en armes forçant les familles à monter.

« C’est une épuration silencieuse », dénonce un habitant de Goma sous anonymat. « Ils prennent les femmes et les enfants, mais personne ne sait ce qu’ils ont fait des hommes. Beaucoup ont disparu ».

P4 brise le silence

Face à ce qu’elle qualifie de « déportation massive déguisée », la plateforme P4 (Plateforme d’opposition rwandaise ), qui regroupe des forces d’opposition rwandaises en exil, accuse frontalement le gouvernement de Kigali d’orchestrer un nettoyage ethnique dans cette région sous occupation.

Dans un communiqué publié le 20 mai, P4 écrit : « Le régime de Paul Kagame, par l’entremise de ses milices, reproduit en RDC les méthodes de persécution ethnique qu’il a mises en œuvre dans l’histoire récente du Rwanda. Cette fois, ce sont les populations Hutu congolaises qui sont ciblées, sous silence diplomatique ».

Géopolitique explosif 

Le conflit dans l’Est de la RDC est complexe, mêlant rivalités ethniques, intérêts économiques liés aux ressources minières et tensions transfrontalières. Le Rwanda a toujours nié soutenir le M23, malgré les preuves accumulées par l’ONU et les ONG. Les relations entre Kinshasa et Kigali sont à leur plus bas niveau, tandis que la communauté internationale reste prudente dans ses condamnations.

Selon plusieurs analystes, cette dernière opération à Goma risque d’aggraver davantage la crise humanitaire déjà dramatique dans la région. 

La MONUSCO, présente dans le Nord-Kivu, a déclaré suivre la situation de près, mais n’a pas été en mesure d’intervenir directement.

Des questions sans réponse

Alors que les bus ont quitté Goma sans laisser de traces, le sort des personnes embarquées demeure incertain. Où sont-elles ? Dans quelles conditions vivent-elles ? Et surtout, qu’est-il arrivé aux hommes laissés derrière ? 

Les familles cherchent désespérément des nouvelles.

Pour l’heure, le silence des autorités régionales et internationales renforce le sentiment d’impunité, et laisse craindre une escalade des violences contre une population déjà vulnérable.

  • Bendélé Ekweya té

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