Des esprits, certains malveillants et d’autres étourdis, n’ont résumé le discours du président du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) qu’en une flatterie envers le président de la République lorsqu’il a dit : « Excellence Monsieur le Président de la République, Vous n’êtes pas seul dans cette lutte de la salubrité médiatique ! Vous avez beaucoup pour la liberté d’expression et le CSAC vous en remercie et vous encourage de poursuivre sur cette lancée. Sous votre mandat, aucun journaliste n’a été tué, arrêté et torturé à cause de ses opinions. Aucune rédaction n’a été saccagée, aucune chaîne fermée sous les ordres des services comme ce fut le cas dans le passé ! ».
Beaucoup ont évoqué les cas Yves Buya et Patrick Lokala arrêtés et emprisonnés à Makala sous Tshisekedi pour confondre Bosembe. Or, très concis et précis dans ses propos, ce dernier a parlé d’arrestation et emprisonnement à cause des opinions entant que journalistes alors que dans les deux cas d’espèce évoqués, les deux journalistes avaient connu des affaires purement de droit commun, malheureusement les opposant à leurs propres confrères. Yves Buya avait eu un différend avec Israël Mutombo de Bosolo ya politik, tandis que Patrick Lokala avait été traduit devant la justice par Christian Lusakwano, tous deux poursuivis pour imputation dommageable. Donc, rien à voir avec la liberté de la presse.
Qu’à cela ne tienne, ce qu’il faut noter cependant est que le discours de Christian Bosembe a beaucoup de points positifs car très interpellateur dans l’ensemble pour le bon exercice du métier de journaliste pendant ce temps de guerre d’agression que subit la RDC, pays de ces journalistes interpellés, mieux conscientisés.
« Je ne suis ni censeur ni tyran. Je ne brandis pas le bâillon, je ne tiens pas le fouet. Mais je suis sûr d’une chose ; un pays sans ordre et sans discipline est un navire sans boussole. Je ne brandis pas le bâillon, je ne tiens pas le fouet . Mais je suis sûr d’une chose ; un pays sans ordre et sans discipline est un navire sans boussole », leur lance-t-il pour les rassurer de la méthodologie pédagogique de son discours.
« Nous vivons une époque où l’information devient aussi stratégique que les armes. Ce qui a radicalement changé ces dernières années, c’est la manière dont elle se diffuse et se manipule. L’essor de l’intelligence artificielle transforme la façon dont l’information est produite, consommée et partagée. Chaque citoyen est désormais un producteur potentiel de contenu. Cela ouvre des opportunités, mais soulève aussi de graves défis. En temps de guerre, ce défi prend une autre dimension. La propagande numérique amplifiée par l’IA devient une arme. Réguler l’information n’est pas seulement une affaire technique : c’est une responsabilité collective. Protéger la vérité, c’est protéger la démocratie », avertit Christian Bosembequi précise que des outils comme les deepfakes ou les bots diffusent ces récits falsifiés à une vitesse inédite et leurs contenus n’ont pas besoin de validation journalistique : ils frappent les esprits et modèlent l’opinion.
C’est face à ce danger guettant la société en général et particulièrement celle congolaise que le président du CSAC, trouve le rôle du journaliste capital. Parce que selon lui, il ne s’agit plus seulement question de rapporter les faits, mais de lutter contre l’illusion de vérité étant donné que la désinformation s’avère un vecteur de déstabilisation.
« Quelle étrange perversion de l’esprit faut-il pour prétendre aimer sa patrie tout en caressant les desseins de ses bourreaux ? Il semble que seuls certains fils de ce pays aient réussi là où même Satan a échoué : faire cohabiter l’amour de la patrie avec la trahison, marier le paradis à l’enfer dans une même poitrine, sans honte ni frisson. Quand un journaliste publie une information sans en vérifier la source, quand il relaye une vidéo qui semble authentique mais qui est en réalité manipulée, n’est-il pas responsable de contribuer à une réalité faussée ? Est-ce cela, la liberté d’expression ? Quand toute une rédaction s’arroge le droit de diffuser, de commenter, parfois même de savourer une vidéo où nos vaillants soldats, les FARDC, apparaissent en difficulté, est-ce encore de l’information ou déjà de la trahison ? Et quand, dans la même émission, on célèbre — à mots à peine voilés — les avancées des terroristes, ces journalistes ont-ils seulement conscience du poids de leurs mots ? Mesurent-ils que derrière chaque mètre gagné par l’ennemi, ce sont des vies arrachées, des libertés piétinées, des droits effacés comme des traces dans la poussière ? Ont-ils oublié que lorsqu’un village tombe, il n’emporte pas que des cases ou des collines : il emporte des existences, des rêves en germination, des destins en devenir, des talents que le pays ne reverra plus ? Ce sont des familles disloquées, des enfants qui grandissent dans le fracas des armes, des espoirs qui fuient comme le vent entre les doigts ? », interroge Christian Bosembe qui trouve sans ambages qu’il ne s’agit plus de liberté d’expression, mais plutôt d’une complicité déguisée, d’une parole qui, au lieu d’éclairer, enfonce un peu plus le pays dans la nuit. Et pour cela, estime-t-il, aucun micro, aucun plateau, aucune éthique professionnelle ne saurait le justifier.
« Non, je ne réclame pas des muselières en soie fine. Je ne demande pas que l’on taise, mais que l’on pense. Que l’on pèse. Que l’on vérifie. Le journaliste n’est pas un simple écho. Il est vigie. Il éclaire, filtre, décrypte. Mal informer, c’est trahir. La plume peut être aussi destructrice qu’une arme », conseille-t-il en martelant que « la liberté, si belle soit-elle, n’est pas licence — elle exige la responsabilité ».
Et d’interpeller vivement : « …que chacun prenne la mesure de sa responsabilité, car nous n’avons pas deux pays, nous n’en avons qu’un seul. Un seul. Et s’il venait à sombrer, ce ne serait pas à un seul homme, d’en payer seul le prix. Non. Ce serait nous tous. Tous, sans exception ».
Le président du CSAC ne digère pas que certains travaillent activement non pas pour le progrès mais pour le déclin, croyant que si le pire arrivait seul président en sera responsable. « C’est faux, le désastre, s’il vient, il sera collectif », observe-t-il.
« …que nul ne se serve de la liberté d’expression comme d’un paravent pour l’irresponsabilité. Car comme le disait Thomas Hobbes, dans les lignes austères de son Léviathan, la liberté sans sécurité n’est qu’un masque de mort, et la paix, la véritable paix, exige que l’on sacrifie un peu d’orgueil sur l’autel du bien commun », conclut-il son discours.