Le feuilleton judiciaire de l’affaire Bukanga Lonzo prend une autre tournure. Cette fois-ci, le député national, Matata Ponyo s’impose spécifiquement en recourant aux textes légaux de la séparation du pouvoir.
Dans cet angle pris par l’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo, une défense institutionnelle s’impose : celle des immunités parlementaires. En effet, dans une lettre adressée lundi 21 avril au président de la Cour constitutionnelle, Matata Ponyo justifie sa décision par la position adoptée par l’Assemblée nationale, qui s’est formellement opposée à ces poursuites.
Lors de la plénière du 17 avril dernier, les députés ont jugé la procédure « inconstitutionnelle », dénonçant une violation flagrante de la Constitution, en particulier des articles relatifs à la protection des immunités parlementaires, ainsi que du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
« En tant que député national, je suis protégé par ces immunités », écrit-il. « La plénière a exigé que la Cour respecte scrupuleusement la procédure prévue par la Constitution et le Règlement intérieur avant toute poursuite contre un parlementaire. »
Pour rappel, Matata Ponyo fait face à des accusations de détournement de fonds publics dans l’affaire Bukanga Lonzo, un projet phare du gouvernement sous sa direction, aujourd’hui largement considéré comme un échec économique majeur. Il est également cité dans d’autres dossiers judiciaires liés à la mauvaise gestion de ressources publiques.
Le président du parti Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD) estime que toute procédure engagée sans la levée préalable de ses immunités parlementaires constitue une atteinte grave à l’État de droit et au principe de séparation des pouvoirs.
Par conséquent, l’ex-chef du gouvernement ne sera pas présent à l’audience prévue ce mercredi 23 avril 2025. La Cour constitutionnelle devra donc poursuivre l’examen du dossier sans sa présence et se pencher sur la régularisation de la procédure, notamment en ce qui concerne la comparution de Deogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque centrale et autre accusé clé dans ce dossier.
Retenez que cette décision de Matata Ponyo intervienne dans un contexte politique tendu, où les relations entre institutions judiciaires et législatives sont mises à rude épreuve. Elle relance également le débat sur l’indépendance de la justice et le respect du cadre légal encadrant les poursuites contre les élus de la République.
Cette démarche serait-elle une vraie manœuvre dilatoire dans la procédure ? A ce point les juristes ne s’accordent pas, selon le camp que l’on se trouve. Chacun essaie de tirer le drap de son côté. Dans sa tribune publiée par Scoop RDC, Ruffin Kubangisa Matondo, chercheur indépendant en droit public, estime que c’est à tort que Vital Kamerhe (président de l’Assemblée nationale) a pris une position juridiquement incongrue d’autant plus que Matata n’était pas député au moment où le parquet général saisissait la Cour constitutionnelle par une requête en fins fin de fixation de date d’audience, il était sénateur. Sa comparution avait déjà eu lieu, autorisée par le Sénat et que le dossier est en cours et n’a jamais été clôturé. Demander à la Cour constitutionnelle d’écrire en vue de régulariser un différend se trouvant déjà dans son office et dont l’instruction a déjà démarrée il y a belle lurette, c’est énerver l’article 151 de la Constitution, une disposition essentielle de notre démocratie constitutionnelle, argumente-t-il.
Dossier à suivre !