Procès « forages » : Nicolas Kazadi fait parler la technicité devant la Cour

Le procès sur l’affaire dite des forages qui oppose le ministère public aux prévenus François Rubota, ancien ministre d’État du Développement rural, ainsi qu’à l’entrepreneur Mike Kasenga, patron de la société Stever construct, tous deux poursuivis pour détournement des deniers publics alloués à ce projet, s’est poursuivi ce lundi 09 décembre 2024 avec l’audition de deux renseignements absents lors de l’audience précédente. Il s’agit des anciens ministres Guy Mikulu et Nicolas Kazadi, respectivement du Développement rural et des Finances.

Premier à être auditionné : Guy Mikulu. Ce dernier a reconnu avoir signé ce contrat bien que démissionnaire. Il le justifie par l’ordre reçu de la « haute hiérarchie ». Aux questions des juges sur le caractère léonin du contrat et sa surfacturation, l’ancien ministre d’État du Développement rural soutient et martèle qu’il ne s’agit nullemen ni de l’un, ni de l’autre. La signature du contrat, explique-t-il, a suivi toutes les étapes de la procédure légale de passation des marchés publics. Et que le prix d’au moins 390 mille USD par unité de station de pompage et de traitement d’eau, une sorte de mini-réseau de distribution d’eau, était raisonnable pour les experts de passation des marchés publics d’autant plus que selon les calculs, le projet coûtait ou coûte à chaque bénéficiaire au moins 48 USD pour une fourniture d’eau 24 heures sur 24. Prix qui l’a poussé à qualifier le projet de « salutaire » pour 5 millions de personne, surtout que l’on était dans une période critique de Covid-19, pandémie qui ravageait le monde.

Cependant, une divergence est apparue entre Guy Mikulu et l’entrepreneur Mike Kasenga sur l’entendement de « préfinancement ». Pour l’ancien ministre du Développement rural, la société Stever construct devait fournir clé à la main les 200 stations de la première phase et se faire payer après. Mais pour Mike Kasenga, le fait qu’il avait acheté les matériels de 151 stations et commencé les travaux sur fonds propres, cela s’appelle « préfinancement ». Cette divergence sera aplanie par Nicolas Kazadi qui a montré que les deux ont raison et personne n’a tort dans son entendement sur le préfinancement. Pour l’ancien ministre des finances qui a évoqué beaucoup de cas de préfinancement qui sont allés dans le sens de l’un et de l’autre, il aurait fallu le dire explicitement dans le contrat pour éviter tout malentendu. Ce qui n’a pas été précisé dans le contrat signé par les deux parties. Pour le cas d’espèce, Nicolas Kazadi trouve valable la raison de difficultés rencontrées par les banques pendant cette période de Covid-19, avancée par la société Stever construct pour recourir aux acomptes ou avances auprès de son partenaire Gouvernement en vue d’éviter l’arrêt des travaux.

Quant aux questions le concernant personnellement, notamment sur la procédure d’urgence et la surfacturation dont on lui reproche, l’ancien argentier national a fait parler la technicité, s’étalant sur plusieurs exemples ; technicité qui semble avoir convaincu la Cour d’autant plus que sa lanterne a été suffisamment éclairée. 

« Peux-tu dire qu’il y a détournement dans cette affaire ? ». A cette question de la Cour, Nicolas Kazadi a déclaré qu’il ne peut y répondre avec légèreté simpliste à jeter les gens responsables en pâture comme l’ont fait certains services de l’État, en citant nommément l’Inspection générale des finances dont il déplore et critique sévèrement le populisme dans ses rapports.

Pour Nicolas Kazadi, ayant lui-même vu les matériels déjà disponibles pour la construction des stations de pompage et de traitement d’eau dans les entrepôts de Stever construct, il souhaite que l’État ou le gouvernement congolais qui s’est engagé dans le contrat à disponibiliser les sites dans les localités par lui ciblées à travers le pays, facilite cette tâche à la société Stever construct pour qu’elle achève les travaux. Parce que le retard dans l’exécution du contrat est dû, comme le soutient d’ailleurs avec raison Mike Kasenga, par la non disposition par son partenaire Gouvernement, des sites où doivent être érigées les stations de pompage et de traitement d’eau comme stipulé dans le contrat. « Cette défaillance contractuelle n’est pas à mettre sur mon dos », se défend toujours.

Il faut dire que depuis le début de ce procès dont le réquisitoire du ministère public et les plaidoiries des avocats de la défense sont attendus le 23 décembre prochain, les questions tournent toujours autour des clauses du contrat. Le détournement dont est reproché les deux prévenus François Rubota et Mike Kasenga, infraction pour laquelle ils sont devant la Cour de cassation, peine à être démontrée. Ce qui fait dire aux praticiens du Droit qu’il s’agit d’une affaire civile qui devait en principe se régler au niveau du tribunal de commerce. Dossier à suivre.

  • Bendélé Ekweya té

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