Magistrature : Au-delà de la suspension du PG près la Cour d’Appel de Kinshasa/Gombe

L’incident du 23 août dernier ayant entraîné le déguerpissement irrégulier d’un diplomate français à Kinshasa, n’a pas fini de livrer ses secrets. Le dernier en date, c’est la suspension du procureur général près la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe, la suspension des autres responsables étant intervenus dans cette irrégularité ainsi que l’arrestation de tous les agents ayant pris part à cette forfaiture, apprend-on dans un communiqué émis par le cabinet du ministre d’État de la Justice et de garde des sceaux, Me Constant Mutamba.

En effet, c’est sur base d’une réquisition d’information émise par ce magistrat du parquet, que le diplomate français a été chahuté dans sa résidence, alors que le Traité de Vienne dont la RDC est signataire, garantit à chaque diplomate la protection dans le pays hôte. Ce qui n’a pas été le cas pour ce pauvre diplomate, causant ainsi un préjudice sérieux dans les relations déjà pas au beau fixe entre la France et la RDC.

Ainsi, réagissant à l’injonction du ministre d’État de la Justice et de garde des sceaux, le Procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, dans sa décision n°006/PGCCAS/2024 de mercredi 27 août 2024, portant interdiction d’un magistrat du ministère public, décide d’interdire de l’exercice de ses fonctions, à titre conservatoire, le magistrat Lusamba Mbombola Jean Placide, procureur général près la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe, matricule D.000342.

Dans le procès-verbal de constat de fautes disciplinaires et d’ouverture d’action disciplinaire parvenu à Scooprdc.net, il est reproché à l’incriminé ce qui suit :

– Avoir manqué aux devoirs de son État, à l’honneur ou à la dignité de ses fonctions, en violant les prescrits de l’article 22 paragraphes 1er et 3 de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 qui consacre l’inviolabilité des locaux de la mission diplomatique ;

– Avoir dans les mêmes circonstances de lieu et de son état, à l’honneur ou à la dignité de ses fonctions, en l’espèce avoir refusé de respecter les prescrits de la circulaire n°04/CSM/P/PM/2023 du 17 juillet 2023 du président du Conseil supérieur de la magistrature, portant instructions générales relatives au respect des accords internationaux sur les immunités des membres et locaux des représentations des États étrangers et des organisations internationales en RDC ; Faits constitutifs de faute disciplinaire au regard des articles 46 et 47 point 7 de la loi n°06/020 du 10 octobre 2006 portant statut des magistrats en RDC.

La question que d’aucun se pose, comment une réquisition d’informations du parquet peut-elle donner lieu à un déguerpissement ?

Selon la procédure pénale internationalement reconnue, une réquisition d’informations est demandée par un magistrat du parquet auprès de son OPJ, pour lui permettre de comprendre un dossier en instruction dans son office et non pour l’exécution d’un jugement qui est censé avoir la force de la chose jugée. Dans le cas de l’exécution d’un jugement comme le rappelle bien le communiqué du ministère de la justice, seul les huissiers de justice conformément à la loi n°16/011 du 15 juillet 2016 portant création et organisation de la profession de huissier de justice, sont habilités à procéder à l’exécution des jugements.

Ici, le Procureur général près la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe vient d’être pris la main dans le sac dans les pratiques d’expropriation devenues très courantes dans la ville de Kinshasa, mais très particulièrement dans la commune de la Gombe ; expropriation concoctée par un réseau mafieux composé des magistrats, greffiers, agents l’Urbanisme et habitat et ceux des Affaires foncières, agents de sécurité et tierces personnes. Si le PG Lusamba Mbombola Jean Placide est tombé dans cette affaire, comme disent les Kinois « dans un mauvais pool », combien de forfaits pourrait-il avoir commis sur de pauvres veuves et orphelins sans défense qui se sont vus déposséder de leurs héritages immobiliers ou parcellaires à cause de faux jugements fabriqués sous les manguiers ? 

Au-delà de la suspension, d’autres sanctions pénales doivent être envisagées contre ce réseau maffieux pour décourager les autres magistrats véreux qui ont rendu la justice congolaise très malade.

  • Bendélé Ekweya té

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