Lorsque le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya avait lancé le slogan « Kinshasa engege » (traduisez : Kinshasa doit briller), sûrement qu’il s’adressait à tous les Congolais qui vivent dans la capitale à jouer sa partition pour redonner à la capitale de la République démocratique du Congo (RDC), son nom de Kin-la-belle.
Certes, l’appel du feu cardinal Laurent Monsengwo résonne encore dans les oreilles de Kinois, mais certains compatriotes refusent d’intérioriser sa portée. Sinon, certains acteurs politiques, en ce moment de la mise en place de nouvelles institutions, après les élections du 20 décembre 2023, ne réveilleraient pas les démons de faire croire aux gens que la ville de Kinshasa ne peut être gouvernée que par un ressortissant du Kongo central, de l’ex-province du Bandundu ou d’un Teke-Humbu.
Ceux qui épousent cette thèse refusent même d’accepter que Kinshasa, bien que située entre le Kongo central et l’ex-Bandundu, est une ville cosmopolite qui accueille les Congolais venus de toutes les vingt-six (26) provinces. En 1987, à l’issue des élections législatives, tous les sièges étaient gagnés par les candidats originaires soit du Bas-Zaïre, soit du Bandundu. Et pour montrer que Kinshasa n’appartient pas aux Bakongo de deux provinces précitées, le maréchal Mobutu avait exigé l’organisation des élections partielles pour donner la chance aux candidats venus d’autres espaces linguistiques. C’est à l’issue de celles-ci que seront élus Timothée Moleka Nzulama, Kudura Kasongo…
Épouser la thèse de Kinshasa aux ressortissants du Kongo central, de l’ex-Bandundu ou des Teke-Humbu, c’est montrer qu’on ne maîtrise pas bien l’histoire de la ville de Kinshasa. Sous le règne du maréchal Mobutu, la ville de Kinshasa avait été dirigée par ces gouverneurs : Ndjoku eyo Baba (Equateur), Kabayidi wa Kabayidi (Kasai), Tshimbombo Mukuna (Kasai), Nzuzi wa Mbombo (Kasai), Amela Lokima Bahati (Province-Orientale), Moleka Nzulama (Equateur), Mujinga Nswana (Katanga). C’est lorsque les Kabila (père et fils) avaient recouru la rhétorique de la Territoriale des originaires qu’on a vu Théophile Mbemba (Ex- Bandundu), Lokwa Ne Kongo (Kongo central), Nkui Imbie (Kinshasa), Jean Kimbunda, André Kimbuta (Ex-Bandundu), Gentiny Ngobila (Ex-Bandundu) prendre la commande de la capitale.
Qu’a apporté cette politique de la Territoriale des originaires ? Des spécialistes vous diront qu’elle a tout simplement freiné le développement des ETD, car personne n’était prête à dénoncer son « frère » même s’il a péché. Or, dans ses dernières interventions dans les médias, le chef de l’Etat congolais, Félix-Antoine Tshisekedi, n’a pas caché sa volonté de voir les provinces être dirigées par les non originaires. Félix Tshisekedi l’avait clairement dit dans une interview accordée à notre consœur Tina Salama.
Vouloir faire croire à Félix-Antoine Tshisekedi, lui qui a fait de la lutte contre le tribalisme son cheval de bataille, que Kinshasa doit nécessairement être dirigée par un gouverneur venu soit du Kongo central, soit de l’ex-Bandundu, soit un Teke-Humbu, c’est étaler son ignorance sur la nouvelle dynamique que veut imprimer l’actuel locataire du Palais de la nation sur la direction des provinces.
L’histoire politique de la RDC renseigne que Konde vila Kikanda (muyombe du Kongo central), est resté le meilleur gouverneur du Nord-Kivu (où il a même été élu député national en 2011), Nzuzi wa Mbombo (Kasaienne), meilleure gouverneure au Kongo central, Koyagialo Nbgase te Gerengbo (originaire de l’ex-Equateur), meilleur gouverneur au Katanga, Malumba Mbangula (Kasaien), meilleur gouverneur au Bandundu…
Personnellement, j’ai toujours été partisan de la Territoriale des non originaires, car elle avait produit des résultats positifs à l’époque.