Activité bancaire en RDC : Une mine d’or pour les maisons-mères (FMI)

Publié au mois d’août dernier, le rapport du Fond Monétaire International (FMI) sur les marchés monétaires et de capitaux en RDC signale que l’argent épargné des Congolais en devise sert beaucoup plus les maisons-mères des banques étrangères installées en RDC à cause de leur surliquidité due au faible financement de l’économie par le secteur bancaire. 

En effet, à en croire ce rapport, la RDC figure parmi les 10 pays du monde au plus faible ratio crédit/PIB, soit près de 7,5% à fin 2020 contre une moyenne mondiale de 147,6%. La contribution du secteur bancaire au financement de l’économie reste très modeste, avec une faible diversification du portefeuille et une prédominance des prêts en monnaie étrangère qui ont représenté une moyenne de 89,2% du portefeuille des prêts à l’économie sur les cinq dernières années. Cette situation est imputable notamment à un climat des affaires peu favorable. La plupart des crédits sont octroyés aux secteurs économiques autres, notamment l’immobilier et les mines (25% et 24% du total du crédit).

Comme l’activité de crédit est très faible, les banques se retrouvent avec des ressources excédentaires importantes, qu’elles placent auprès de leurs correspondants à l’étranger, ou de leurs maisons mères, ou de leurs concurrents locaux.

Les banques ne finançant presque pas l’économie nationale (7,5% de crédit/PIB contre une moyenne mondiale de 147,6%), la centralisation des liquidités des filiales en RDC chez les maisons mères à l’étranger constitue une vulnérabilité macrofinancière clé pour la RDC de sorte qu’en cas de crise financière, le risque principal est celui d’une contagion depuis la maison-mère. Le second risque est celui d’une filiale bancaire en RDC rencontrant des difficultés tandis que la maison-mère se montre peu disposée à apporter son soutien. C’est les cas qu’ont connu la Banque congolaise, BIAC et actuellement Afriland First Bank. Ceci, fait craindre d’arriver au pire comme ce fut le cas pour les clients de la BIAC qui ont tout perdu. Alors que l’épargne d’un client n’est pas une loterie où ça passe ou ça casse ! Une fuite des capitaux des Congolais à l’étranger via leurs succursales de banques : Rawbank/Inde, Equity BCDC/Kenya, FBNBANK/Nigeria, ECONBANK/Togo, TMB/Israël, UBA/Nigeria, ACCESS/Nigeria, SOFIBANK/Emirats, etc.  

A la base de ce comportement, la Mission du FMI a identifié cinq vulnérabilités macrofinancières dans ce marché monétaire et de capitaux, à savoir : la faiblesse des fonds propres du système bancaire ; la difficulté à évaluer les prêts non-performants (PNP) suite aux mesures COVID-19 ; les risques liés à la dollarisation financière ; la rupture des relations de correspondants bancaires (RCB) du fait du “derisking” (Ndlr : Le derisking est la décision de mettre fin à une relation d’affaires lorsque le risque client est considéré plus sensible) et enfin la centralisation des liquidités des filiales banques en RDC chez les mères à l’étranger.

Le rapport reconnaît en outre que le système financier en RDC est relativement petit, largement dominé par les banques et très concentré. Le total des actifs financiers s’élève à 24,7% du PIB (2021) et les actifs des banques composent 97% du système financier. Il y a trois types de banques : locales (4), panafricaines (9) et internationales (2). Et deux banques sur les quinze que compte le pays, détiennent 55% des actifs du système bancaire. Environ 90% des crédits sont localisés dans deux des 26 provinces, Kinshasa et Haut-Katanga.

Ainsi les excédents de fonds détenus par les banques, résultent essentiellement des dépôts en monnaie étrangère qui ont doublé depuis le début de la pandémie, en conséquence des obligations de rapatriement de devises plus élevées suite au changement du code minier qui impose un rapatriement de 60% des revenus contre 40% auparavant. D’où le total des dépôts est passé de US$ 5,63 milliards en mars 2020 à US$ 10,33 milliards en septembre 2021, la plupart en comptes courants / comptes à vue (62% des dépôts). La plupart des clients préfèrent épargner en devises, ce qui maintient le degré extrêmement élevé de dollarisation du système bancaire et sa surliquidité. De sorte qu’en septembre 2021, les dépôts en devises représentaient environ 85% du total des dépôts.

Le niveau et l’évolution des indicateurs de rentabilité révèlent une fragilité du modèle d’affaire des banques de RDC. Une analyse comparative avec certains pairs de la région (pays très dépendants des exportations du secteur minier) souligne que l’activité bancaire en RDC est l’une des moins rentables de la région malgré des marges d’intérêts très élevées, à plus de 10%. Un environnement des affaires difficile avec une application incertaine de la règle de droit se combine avec le manque de diversification de l’économie, limitant la demande potentielle de services financiers, en particulier de crédit. 

Les marges d’intérêts ne contribuent pas significativement à la rentabilité dans la mesure où les banques ne sont pas suffisamment actives sur le crédit. Les coûts d’exploitation sont élevés, de même que les charges fiscales, parafiscales, les frais de supervision bancaire (d’un montant annuel de 0,6% du total des dépôts). Les résultats agrégés ont été déficitaires en 2020 mais cela est dû à un provisionnement imposé à une banque systémique. La situation devrait s’améliorer nettement pour 2022 compte tenu de la hausse des prix des matières premières.

  • Bendélé Ekweya té

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