La deuxième audience du procès opposant le Ministère public à François Beya, ancien Conseiller spécial en matière de sécurité du président Tshisekedi, et coaccusés, poursuivis pour atteinte à la personne ou à la vie du chef de l’Etat, a eu lieu ce vendredi 10 juin devant la Haute cour militaire à la prison centrale de Makala.
La liberté provisoire et la retransmission en direct du procès à la télévision sollicitées par les avocats de la défense à la première audience d’il y a une semaine, ont été rejetées par la Cour. Mais cela ne les a pas empêché d’user de leurs moyens pour d’abord rabrouer l’Agence nationale des renseignements (ANR) à la base de l’arrestation dans l’irrégularité totale de François Beya et ses coaccusés, et pour ensuite récuser la compétence de la Haute cour militaire à juger cette catégorie de prévenus.
« En arrêtant et en détenant François Beya au-delà de 48h, l’ANR a agi en marge de la loi et déshonoré la République. Elle s’est octroyé les pouvoirs que ne lui reconnaît aucune disposition d’aucune loi. Elle a usé de l’arbitraire », commencent les avocats de la défense leurs remontrances sur le service d’intelligence congolais.
Et de continuer : « Toutes les pièces fournies par ANR sont nulles et de nul effet car obtenues en violation de la loi. Bien que dessaisie du dossier par la Haute cour, l’ANR a continué à envoyer des pièces. Ce qui trahit de sa part un abus démesuré du pouvoir. Au vu de tous ces moyens, M. le Président, le complot en question, c’est celui ourdi par l’ANR contre notre client, en le chargeant des affabulations ne reposant sur aucune preuve honnête ».
Les avocats de la défense estiment qu’en exploitant les données personnelles du téléphone de M. Beya, l’ANR a violé la loi relative aux Télécom qui exige une réquisition préalable du procureur de la République. Toutes les données ainsi saisies ont été obtenues pour asseoir l’accusation sont nulles car obtenues hors la loi.
S’agissant particulièrement de Guy Vanda, le parsec de François Beya, ses avocats soutiennent qu’en affirmant que le régime en place est des parvenus, leur client n’a pas commis une infraction, mais a plutôt émis une opinion en tant que citoyen. « L’arrêter, le juger et le condamner ne fait que discréditer l’ANR et jeter de l’opprobre sur notre justice », ont-ils martelé.
Quant aux chefs d’accusation ayant traité les prévenus devant la Haute cour, les avocats de la défense s’étonnent que la citation à prévenu n’indique même pas l’intention ni l’intelligence des prévenus pour commettre un complot. Même leur participation à cela n’a pas été précisée ni clarifiée. Clairement dit, les avocats ont démontré que le lieu de l’infraction est inconnu, la date et l’entente des prévenus le sont aussi. Il s’agit pour eux d’une action irrecevable pour violation grave des droits des prévenus.
Non sans raison, car ils argumentent s’agissant du complot que la citation à prévenu est aussi imprécise qu’invraisemblable. Le complot est aussi vague qu’un écran de fumée et ne porte ni sur une date, lieu ni les personnes et encore moins l’intention. « Messieurs de la Haute cour, le Ministère public est-il sérieux? », se sont interrogés les avocats de la défense avant de dire à la Haute cour militaire : « la constitution et les lois de la république, y compris le code de justice militaire vous déclare incompétente pour juger notre client. Que fait François Beya ici et pourquoi vous le jugez ? Vous n’êtes pas son juge naturel, vous n’en avez pas qualité ».
Même pour le prévenu civil Guy Vanda, ses avocats ont récusé la Haute Cour en narguant que même s’il serait militaire, mais n’ayant pas le grade de général, il ne pouvait pas directement comparaître devant la dernière instance de justice militaire. La demande formelle de mise en liberté a été introduite et la réponse est attendue le lundi 13 juin. La prochaine audience pour la réplique du Ministère public est prévue le vendredi 17 juin 2022.