C’est un Daniel Aselo hors du commun qu’on a vu et entendu dans les images tournées par la Radiotélévision nationale congolaise, où l’homme s’en est pris violemment aux élus provinciaux, citant en exemple sa propre province du Sankuru, en marge de la rencontre que le chef de l’État Félix Tshisekedi a eue avec les députés provinciaux de la République la semaine dernière au Palais du peuple.
En effet, réagissant à une question de la presse sur l’implication par Félix Tshisekedi des députés provinciaux au projet de développement des 145 territoires, l’on pourrait affirmer avec un français d’argot que Daniel Aselo, ministre de l’intérieur, sécurité et affaires coutumières a « pété les plombs » par la teneur non seulement vraie mais également directe de son propos à l’égard des élus provinciaux, qu’il accuse à raison d’ailleurs d’être à la base de la déstabilisation des provinces. Mais seulement, c’est le ton utilisé pour le dire et les gesticulations peu dignes qui ont trahi le sens de sa raison.
« …vous constatez que les députés provinciaux de la RDC n’arrivent pas à comprendre la chose politique qui est en train de se passer dans ce pays. Je peux vous donner une illustration parce que je sais qu’il y en a, qui sont instrumentalisés par leurs collègues. Je ne peux pas m’empêcher de parler de moi-même. Dans ma province du Sankuru, ça fait trois ans depuis que Félix Tshisekedi est président de la République. Cette province n’a jamais eu, alors jamais eu un gouvernement provincial. C’est à cause de qui ? A cause de ses députés provinciaux. C’est à cause de ces députés provinciaux qui ne cherchent que l’argent. Ils ont suite aux injonctions leur données par leurs députés nationaux et sénateurs, mis cette province du Sankuru dans la situation où elle est aujourd’hui. Et au lieu que les députés provinciaux des autres provinces soient solidaires à cette population du Sankuru, ils viennent crier sur le ministre de l’intérieur que je suis, parce qu’ils sont instrumentalisés par leurs collègues du Sankuru. C’est ne pas normal ! ».
Et Daniel Aselo de poursuivre : « Il y a de députés, alors que le président de la République a envoyé de l’argent, 500.000 USD à chaque province, nous sommes informés qu’il y a de gouverneurs des provinces, qui ont pris cet argent, et qu’ils se le sont distribués avec certains députés pour qu’ils ne soient pas évincés de leurs postes. Nous sommes informés que pour tous les députés provinciaux de la RDC, la stabilité de leur province passe par la déstabilisation de gouvernements provinciaux. C’est ce qu’ils viennent de dire, et c’est ce qu’ils viennent faire voir au président de la République. Lorsque eux sont en train de dire au ministre de l’intérieur que je suis, de ne pas m’immiscer dans leurs fonctionnements, ils veulent tout simplement dire : monsieur le ministre, donnez-nous l’occasion de déstabiliser tous les gouvernements provinciaux et que nous, nous restons en stabilité… » .
Contacté à ce sujet, un ancien fonctionnaire de province donne raison au ministre Daniel Aselo et s’étonne de la confiance que voudrait mettre Félix Tshisekedi aux élus provinciaux qui sont réputés comme mercenaires et cela est connu de tout Congolais.
« Pour moi, si le président de la République ose associer ces mercenaires dans son projet de développement à la base de 145 territoires, c’est l’échec assuré. Savez-vous comment ils appellent leur session parlementaire ? : « Zando » (Ndlr : marché). Comprenez par vous-mêmes qu’un soit disant élu, puisse qualifier une session parlementaire de marché… », explique l’ancien chef de section de la brigade financière de la Mongala, un service provincial créé par le gouverneur José Makila en son temps, pour le contrôle de recettes rétrocédées aux provinces par le gouvernement central.
Ces accusations véridiques de Daniel Aselo relancent le débat sur l’opportunité pour la RDC aujourd’hui d’avoir dans son architecture institutionnelle d’une part les assemblées provinciales budgétivores, et d’autres parts, un sénat aussi onéreux qui, en réalité, n’a comme rôle, que son président puisse remplacer le chef de l’État en cas d’empêchement définitif. C’est dans ces genres de débats que les Congolais attendent ceux qui se disent politiciens de prendre le devant pour initier de vraies réformes pouvant booster la RDC, et déclencher la renaissance de cet État qui peine à décoller depuis son accession à l’indépendance en 1960.