Tiré de Forum des As/José Nawej.
S’il quitte les cabinets ministériels douillets de Gombe pour une implémentation effective sur le terrain, le programme de développement de 145 territoires constituera la première réponse concrète au dépérissement continu du pays réel. Ce que l’on appelle non sans condescendance « arrière-pays » a été longtemps comme sacrifié sur l’autel du jacobinisme kinois.
Depuis les années Mobutu jusqu’à ce jour, les différents gouvernements centraux ont fait consciemment ou inconsciemment de Kinshasa l’alpha et l’oméga des politiques publiques. Si bien que dans nombre de secteurs, des ministres à compétence nationale n’ont, dans la plupart des cas, que la capitale pour unique champ d’exercice de leur autorité.
Si, dans les textes, le pays est à l’ère et à l’heure du régionalisme constitutionnel, dans les faits cependant, les lignes ont fort peu bougé. La tendance et la tentation jacobines ont la peau dure. Dans ce contexte, le programme de développement de 145 territoires initié par le pouvoir fatshiste sonne comme un nouveau paradigme, susceptible d’induire le nécessaire essor du pays par la base.
Comment ne pas saluer cette initiative qui a vocation à revivifier les territoires, cellules de base du pays ? Comment ne pas encourager cette dynamique qui donnera enfin un contenu au slogan désincarné selon lequel « Kinshasa n’est pas la RDC » ?
Le hic, c’est qu’il faudra éviter à cette « thérapie » d’être piratée et frelatée par une forte dose d’alchimie politique. Une politisation à outrance de cette démarche développementaliste risque de faire chavirer l’initiative au mieux dans la gadgétisation avec des réalisations cosmétiques ou tape-à-l’œil et, au pire, dans l’univers très riche des slogans creux.
Certes, on n’imagine pas le Pouvoir Tshisekedi initier pareille entreprise à l’échelle de tout le pays sans chercher à en tirer un bénéfice politique. Contrairement à la religion, ici comme ailleurs, la politique rime systémiquement et systématiquement avec le retour sur investissement. Personne ne saurait faire grief à la Fatshisphère de semer et de jouir de la récolte. Surtout à moins de deux ans des élections générales dont la présidentielle à laquelle le Président déclare matin, midi et soir être candidat.
Le risque est cependant de voir la rentabilité politique à court terme l’emporter sur l’impératif existentiel de monter des projets structurants à même de booster justement le développement à la base. De ce point de vue, même l’implication hyper médiatisée des députés provinciaux a tout d’un couteau à double tranchant.
Si l’exercice consiste à ce que ces élus de proximité préparent leurs bases respectives à s’approprier la dynamique de développement au niveau du territoire, banco!
Si, par contre, approche d’élections des gouverneurs de provinces oblige, le but de la manœuvre est de les amadouer en en faisant des « promoteurs » sans profil de l’emploi à la manière des acquéreurs zaïrois, le programme de développement de 145 territoires fera pschitt.