L’un est activiste et défenseur des droits de l’homme, président de l’Asadho (Association africaine de défense de droits de l’homme) et l’autre est ancien gouverneur de l’ancienne province du Kasaï occidental et actuellement député national, élu de Kananga. Ils ont tous écrit dans cette même semaine, des tribunes au sujet du comportement de l’Agence nationale de renseignements (ANR), principalement en ce qui concerne la détention de François Beya dit Fantômas, ancien Conseiller spécial en matière de sécurité du président de la République, Félix Tshisekedi.
Si Jean-Claude Katende parle du retour des mauvaises pratiques à l’ANR et en appelle directement au président Tshisekedi lui-même pour qu’il lui plaise de prendre des mesures pour que les Congolais arrêtés par l’ANR jouissent de leurs droits constitutionnels, notamment d’informer les membres de leurs familles sur leur statut et les lieux où sont détenus sans oublier le droit de recevoir de la visite et d’avoir accès aux services de leurs avocats, Claudel-André Lubaya lui dénonce la décapitation de l’Etat de droit dans cette affaire désormais dite « François Beya » qui constitue, selon lui, une tâche de boue qui souille les institutions en place et met en cause tous les efforts de consolidation d’un éventuel Etat de droit en RDC.
Ci-dessous les tribunes de Jean-Claude Katende et Claudel-André Lubaya :
« L’avènement du Président Tshisekedi au pouvoir et les premières mesures prises pour humaniser l’Agence Nationale des Renseignements avaient suscité beaucoup d’espoirs pour tous les congolais, surtout la communauté des défenseurs des droits humains.
Sous le Président Joseph Kabila, l’ANR a été un véritable outil de répression de toute personne qui s’opposait au régime en place. Les agents de l’ANR enlevaient qui ils voulaient, ils le gardaient au secret autant de temps que cela leur plaisait.
Il y a eu des personnes qui ont été gardées au cachot de l’ANR pendant plusieurs années sans que les membres de leurs familles ne soient informés et sans accès à un avocat.
Tout ceci en violation de la Constitution et des lois de la République. Plusieurs congolais ont été victimes de la répression systématique de la part de l’ANR et certains en gardent encore des séquelles graves.
Avec la prise de pouvoir par le Président Tshisekedi, nous avions tous pensé que les choses allaient changer fondamentalement. Les mesures prises pour humaniser cette agence ont été saluées et encouragées.
Mais en ce moment où nous écrivons cette page d’opinions libres, le constat fait par nous est regrettable. Les mauvaises pratiques décriées à l’époque refont surface. Pratiques totalement incompatibles avec l’Etat de droit que tous les congolais désirent.
A ce jour, plusieurs personnes ont été enlevées par les agents de l’ANR et gardées au secret. Sans possibilité d’entrer en contact avec les membres de famille ni d’accéder au service d’un avocat. La pratique de refuser aux avocats d’assister leurs clients devant les services de sécurité est contraire à la constitution qui dispose que « Toute personne a le droit de se défendre elle-même ou de se faire assister d’un défenseur de son choix et ce, à tous les niveaux de la procédure pénale, y compris l’enquête policière et l’instruction pré juridictionnelle. Elle peut se faire assister également devant les services de sécurité » (article 19 de la Constitution).
Cette semaine, nous avons reçu certaines familles (femmes, enfants, frères et sœurs) en détresse extrême du fait qu’elles ne savaient pas où se trouvaient leurs proches enlevés par des inconnus. Pensez à ces enfants qui ont vu leur père partir au travail le matin, mais ne pouvaient pas le revoir le soir.
Certains croyaient même que les bandits les auraient enlevés et tués. C’est après plusieurs recherches que nous les avons localisés à l’ANR (UZB).
Nous en appelons directement au Président Tshisekedi lui-même, car l’ANR dépend de lui. Qu’il lui plaise de prendre des mesures pour que les congolais arrêtés par l’ANR jouissent de leurs droits constitutionnels notamment d’informer les membres de leurs familles sur leur statut et les lieux où sont détenus. Sans oublier le droit de recevoir de la visite et d’avoir accès aux services des avocats.
Nous ne sommes pas contre l’interpellation de telle ou telle personne. Nous sommes contre la violation des droits des citoyens dont l’ANR se rend coupable depuis un certain.
Ces mauvaises pratiques de l’ANR nous inquiètent au plus haut point, surtout que nous nous approchons des élections générales.
Depuis plusieurs années, particulièrement de 2015 à 2018, les congolais se sont battus, et d’autres ont été tués pour que les choses changent dans le sens du respect des droits humains et de la démocratie.
Leur sacrifice ne devrait pas être vain. Aucun congolais ne peut comprendre le silence du Président Tshisekedi face à ces mauvaises pratiques.
C’est par le travail des hommes et femmes courageux que la démocratie se construit. Partageons cette page jusqu’à ce qu’elle atteigne le Président Tshisekedi lui-même.
Fait à Kinshasa, le 15 mars 2022
Me Jean Claude KATENDE : (WhatsApp + 243811729908)
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