Hommage de Léonard Mulamba à José Des Chartes Menga : «Les massacres de l’Ituri entre Hema et Lendu, ont été annoncés au monde par ce journaliste»

Léonard Mulamba Kalala est le tout premier rédacteur en chef noir de Radio Okapi en remplacement du tout dernier blanc, Étienne Rougeur. Cet ancien journaliste de l’ex-OZRT (RTNC) et du journal Le Potentiel arrivé à la première heure de la création de la radio onusienne en 2001, a su maintenir la flamme de la fréquence de la paix avant qu’elle s’éteigne avec son successeur sous le règne du piètre Burkinabé Charles Bambara comme directeur de la Division de l’Information publique (PID).

Léonard Mulamba a vu tous les journalistes arriver à Radio Okapi et en tant que secrétaire de rédaction puis rédacteur en chef, il connaît parfaitement les talents mais aussi les faiblesses des uns et des autres. Voilà pourquoi il rend hommage à José Des Chartes Menga, ce journaliste talentueux qui a quitté la terre des hommes dans la matinée du 8 février 2021 dans le témoignage ci-après :

Il était et demeure l’un des meilleurs reporters de Radio Okapi au temps de la splendeur de la radio onusienne. José des Chartes Menga Mbula est décédé de suite d’une maladie le matin de ce lundi 8 février 2021 à Kisangani. Il a  signé certains de reportages les plus osés et les plus mémorables de Radio Okapi. 

A commencer par août 2002, en pleine guerre civile de l’Ituri, José était déjà dans la braise. Parti de sa rédaction à Kisangani,  il débarque à Bunia. Son seule arme, son téléphone satellitaire de la MONUC. Pas encore de contingent onusien à Bunia. Juste quelques 5 observateurs militaires, sans armes. Pas de studio de Radio Okapi qui ne commencera à fonctionner qu’en août 2003. 

Les massacres de l’Ituri, entre principalement Hema et Lendu, ont été annoncés au monde par ce journaliste, José des Chartes Menga qui signera des reportages pathétiques sur les horreurs qui se commettaient en Ituri. ONG et institutions internationales sont ainsi alertées de l’étendue de la tragédie qui se déroulait sans témoins dans cette partie de la RDC. 

Autre fait, le professeur Ntumba Luaba est pris en otage par le Chef Kawa à Mandro en août 2002.  José Menga qui est sur place alerte sur Radio Okapi le monde sur la prise en otage du ministre congolais des Droits humains. C’est encore par José que Ntumba Luaba, revenu à  Bunia,  lance des appels pathétiques pour les négociations de paix pendant que la guerre fait rage dans Bunia. Radio Okapi avait dû interrompre à cet effet le cours de ses émissions pour passer en direct le ministre Ntumba Luaba. Et à la manœuvre, l’intrépide José. 

Plus tard, alors que les combats de différentes milices rivales se déroulaient autour du petit Quartier Général de la MONUC-Bunia et les détonations déchiraient mes casques à la Rédaction centrale à Kinshasa où je me trouvais, j’ai dit, par responsabilité professionnelle, à José des Chartes Menga qui passait en live sur notre antenne : « Arrête et mets toi à l’abri ». Il se mit juste en dessous de la table…

Par ailleurs, parti de Mbandaka un mois plus tôt, à bord d’un convoi de 8 bateaux commerciaux venant de Kinshasa, José signe, tout au long du voyage, des reportages sur les mille facettes de la RDC, avec des tracasseries de toutes sortes. Quand le convoi jette l’ancre dans le port de Kisangani le 2 août 2003 en présence de William Lady Swing, Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies et Chef de la MONUC, signant ainsi le rêve onusien de  réunifier ce pays, José  me dit au téléphone : «Léonard, faire 1000 Kms de Mbandaka à Kisangani pendant un mois, avec mille barrières et contrôles, c’était dur. J’ai même pris du poids. Mais j’avais joué mon rôle, rôle de journaliste, celui d’informer, d’être la Voix de tous ces Congolais en lambeaux de ces villages riverains, enclavés et pris en otages par la guerre et dépouillés par toutes les armées et milices passant par  là…»

Un journaliste congolais, un vrai, comme j’en connais peu en RDC s’en est allé. Il part avec son sourire, sa joie de vivre, sa belle voix radiophonique ainsi que sa maîtrise des règles du métier et de la langue française qui rendaient ses papiers crédibles et beaux à écouter…Va en paix, cher ami. Tu auras tout prouvé.

  • Bendélé Ekweya té

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