La saga Minembwe n’a pas laissé l’Eglise du Christ au Congo (ECC) dans l’indifférence. C’est au point que son président et représentant légal, le Révérend Docteur André Bokundoa Bo Likabe a tenu à adresser un message aux congolais de tout bord en commençant par le premier d’entre eux, c’est-à-dire, le chef de l’État Félix Tshisekedi. Il lui a fait des recommandations comme il en a aussi fait au Parlement, au gouvernement, au pouvoir judiciaire, aux services de sécurité, aux acteurs politiques, à la communauté internationale, aux médias, aux confessions et particulièrement aux chrétiens protestants. Ci-dessous l’intégralité de son message :
« Peuple de Dieu et chers compatriotes,
Que la grâce et la paix vous soient accordées par Dieu notre Père en Jésus-Christ notre Seigneur et Sauveur, Amen.
L’Eglise du Christ au Congo, jouant son rôle de « sentinelle et de prophète » pour notre peuple (cf. Ézéchiel 33 :1ss), et conformément à sa mission évangélique et prophétique portée sur l’accompagnement de la Nation congolaise à sa destinée commune, suit de près la situation sociopolitique de notre Pays.
A cet effet, l’installation de l’autorité administrative à Minembwe depuis le 28 septembre dernier, les réactions enregistrées à différentes échelles à l’intérieur comme à l’extérieur du Pays, la prise de position du Président de la République, ont créé ce que l’on peut appeler «l’affaire Minembwe».
De cette affaire, l’Eglise du Christ au Congo qui salue l’élan de patriotisme observé, car cela prouve à suffisance que les Congolais aiment leur pays uni et fort, constate en même temps, avec amertume le dysfonctionnement dans la collaboration inter-institutionnelle dans cette affaire. En effet, en principe, les institutions de notre pays devraient plutôt s’y pencher avec dextérité et beaucoup plus de délicatesse pour qu’aucune mésaventure ne vienne troubler la paix relative observée dans le Grand Kivu en particulier, et en République Démocratique du Congo, en général.
Il faut reconnaître le fait que «l’affaire Minembwe» a créé quand-même une situation de colère capable de mettre toute la région du grand Kivu voire tout le Pays dans une insécurité, alors que dans la vie de nos compatriotes en général et ceux de la partie Orientale en particulier, la paix, la quiétude et l’harmonie sont déjà assez fragiles.
Prenant la mesure de la chose, l’Eglise du Christ au Congo estime que cette situation n’est pas de nature à favoriser un climat de paix et d’harmonie au sein de notre peuple qui ne demande que de vivre dans un pays où le respect des lois de la République est de rigueur.
C’est pourquoi, l’Eglise du Christ au Congo salue le courage politique ainsi que le sens de responsabilité du Président de la République dans ses efforts en vue de la restauration de la paix, la convivialité entre les Congolais; elle reconnaît que c’est sa prise de parole qui a beaucoup contribué à l’apaisement des esprits de la majorité de notre peuple sur la question déchirante de «l’affaire Minembwe » et surtout sa promesse de s’impliquer personnellement en vue d’un aboutissement rassurant et paisible.
Par ailleurs, l’Église du Christ au Congo:
Observant la recrudescence de la violence armée à l’Est du Pays et les tentatives d’insurrection dans certains coins du Pays ;
Préoccupée par la misère et la précarité qui empirent de jour en jour paralysant la majeure partie de notre population qui se voit abandonnée à son triste sort dans la gestion de conséquences du confinement et du ralentissement de l’activité économique dû, en grande partie, à la pandémie de Covid-19 ;
Consciente du fait que l’affaire Minembwe revêt une sensibilité tant sociologique, politique que diplomatique aux regards des enjeux géostratégiques de l’heure ;
Consciente de la responsabilité lui confiée par l’Eternel Dieu Créateur qu’est celle de protéger et développer la terre et les populations de la République Démocratique du Congo ;
Vu l’exigence de l’identité protestante qui s’impose à elle au moment où le protestantisme dans le monde commémore en ce mois d’octobre les 503 ans de la Réforme de l’Eglise Universelle substantiellement portée par la piété, l’équité, le travail, la charité et le courage de dire la vérité ;
Déterminée à promouvoir le rêve collectif congolais qui voudrait protéger l’intégrité de son territoire et vivre heureux et uni dans ses frontières de 1960 ;
Réitérant son indéfectible engagement à demeurer à l’écoute de toutes les filles et tous les fils de la République Démocratique du Congo ;
Devant Dieu, la Nation et l’histoire, l’Eglise du Christ au Congo tire la sonnette d’alarme et demande :
1. Au Président de la République :
De veiller au respect de la Constitution et aux Lois de la République ;
De s’impliquer personnellement pour faire respecter intégralement la Constitution en dépit de certains articles qui posent quand-même des graves problèmes à l’harmonie et à la cohésion nationale, d’une part et à la souveraineté de notre pays, de l’autre (pour ne citer que les cas des Articles 4, 217) ;
De considérer, outre la mise en place d’un comité scientifique pour statuer sur «l’affaire Minembwe», la nécessité et l’urgence d’appeler les fils et filles du Pays à des concertations nationales en vue d’examiner tous les problèmes qui perturbent la cohésion nationale, la paix durable et la stabilité socioéconomique de notre Pays, lesquelles concertations ne visent aucunement le partage des postes ;
D’intensifier les efforts pour assurer la sécurité des personnes et de leurs biens sur l’ensemble du territoire national, spécialement à l’Est du Pays ;
De prêter une oreille attentive aux différentes revendications des acteurs politiques et ceux de la Société civile en vue de la cohésion nationale ;
De renvoyer le dossier Minembwe au Conseil d’Etat, organe compétant en la matière pour disposition ;
De s’impliquer personnellement, en tant que garant de la Nation, dans la dynamique sociétale qui exige des reformes comme le proposent certains acteurs politiques et ceux de la société civile ;
De poursuivre sans relâche avec d’autres institutions du Pays et la société civile, le combat de l’effectivité de la justice transitionnelle en République Démocratique du Congo en vue de rencontrer les recommandations du Rapport Projet Mapping.
2. Au Parlement :
D’examiner froidement « l’affaire Minembwe » en vue de lever des options courageuses pour toutes fins utiles. Dans le même registre, statuer sur toutes autres questions susceptibles de créer et de raviver les conflits tribaux et ethniques relatifs aux terres et à l’insécurité dans le pays ;
D’encourager l’organisation des concertations nationales en vue d’examiner tous les problèmes qui perturbent la cohésion nationale, la paix durable et la stabilité socioéconomique de notre Pays, lesquelles concertations ne visent aucunement le partage des postes ;
De recevoir et examiner les résolutions des réflexions nationales de la société civile sur les reformes électorales en vue de mettre dans le délai constitutionnel une nouvelle équipe à la tête de la CENI ;
De prendre en compte les différentes situations sociales plus urgentes à résoudre dans l’examen du projet budgétaire 2021 ;
D’examiner les mécanismes de la mise en œuvre de la justice transitionnelle coulée dans les recommandations du Rapport Projet Mapping avec comme corollaire l’installation d’une juridiction internationale spécialisée, la réparation des dommages causés aux victimes et la mise en place d’une commission vérité et réconciliation.
3. Au Gouvernement de la République :
D’éviter des actions qui fragilisent la cohésion et l’action gouvernementales dont le pays a grandement besoin pour son développement ;
De faire de la sécurisation du Grand Kivu, sans oublier d’autres coins de la République en proie à des attaques des forces négatives, une priorité par l’équipement et la motivation des Forces Armées de la République pour la défense du territoire national ;
D’examiner avec diligence de toutes les questions susceptibles de créer et/ou de raviver les conflits tribaux et ethniques relatifs à la nationalité, aux terres et à l’insécurité dans le pays;
De prendre en compte des revendications de la population en vue de la satisfaction de ses besoins fondamentaux de manière générale ;
De collaborer avec la société civile en mettant les moyens nécessaires pour l’accomplissement des initiatives qui relèvent de leurs compétences.
4. Au Pouvoir judiciaire :
De s’impliquer, à tous les niveaux, pour que « justice et paix s’embrassent » en République Démocratique du Congo (cf. Psaumes 85 :10) ;
De s’occuper de tous les cas où l’injustice et l’impunité ont régné dans notre pays afin qu’elles soient triomphées par la justice. Car seule « la justice élève la nation, mais le péché est la honte des peuples » (Proverbes 14 :34);
De continuer à assurer le contrôle de tous les actes administratifs quant à leur conformité à la Constitution et à leur régularité aux lois du Pays.
5. Aux Services de Sécurité :
De faire leur travail avec tact, anticipation et célérité afin d’éviter des disfonctionnements dans l’appareil étatique et dans la préservation et la protection des vies congolaises et l’intégrité territoriale du pays ;
De respecter les limites de leur compétence dans l’exercice de leurs fonctions.
6. Aux Acteurs Politiques :
De faire preuve de la responsabilité citoyenne et du respect du peuple et de l’amour de la patrie ;
De s’engager à l’éducation civique de leurs membres ;
De s’impliquer de bonne foi dans les efforts pour avoir un Congo où le peuple vivra dans les bonnes conditions de vie sur la terre de ses ancêtres. Car il faut que « le peuple d’abord » devienne une réalité de vie dans ce pays ;
D’encourager la tenue de concertations nationales pour examiner tous les problèmes qui bloquent le développement par des conflits.
7. A la Communauté Internationale :
De jouer franc jeu dans l’accompagnement de la République Démocratique du Congo en vue de son développement intégral tout en respectant le droit de souveraineté de notre Pays et de ses frontières intangibles de 1960.
8. Aux Confessions Religieuses :
De favoriser le cadre de dialogue interconfessionnel sincère en vue de réaliser le rêve collectif Congolais ;
D’assurer leur rôle prophétique dans la construction d’un état de droit dans notre Congo ;
9. Aux Médias :
De travailler efficacement pour la cause de la Nation et de notre peuple en dénonçant toutes sortes d’abus conformément aux prérogatives du quatrième pouvoir qui leur sont reconnus ;
De rester professionnels dans l’exercice de leur métier tout en faisant preuve d’éthique et de déontologie.
10. Au Peuple Congolais :
De s’exercer à la construction de la conscience collective pour faire de la République Démocratique du Congo, le pays où il vivra heureux et uni ; oui, un pays uni qu’il lèguera à la postérité ;
De rester éveillé quant à l’intégrité de notre territoire national.
11. Aux Chrétiens Protestants :
Aux fidèles :
D’aimer le Congo et de se mobiliser pour sa défense et dans l’acceptation des uns et des autres ;
De faire du patriotisme leur mode de vie.
Aux Clergés :
D’encourager, soutenir et accompagner les fidèles dans la voie du patriotisme ;
D’organiser les formations sur l’éducation civique, sur l’amour et la protection de nos terres ;
De continuer à prier pour la paix dans notre pays.
Peuple de Dieu et chers compatriotes,
Confiante de voir toutes les promesses de Dieu sur la RDC s’accomplir les unes après les autres, l’Eglise du Christ au Congo croit fermement que le peuple congolais ne tolérera pas que les tensions observées autour de l’« affaire Minembwe » se convertissent encore en de bruits des bottes pour une autre guerre de l’Est, susceptible de concentrer les maigres recettes du Trésor public à l’effort de guerre.
Que le Président de la République, toutes institutions de la République, les différents acteurs sociopolitiques et le peuple Congolais dans son ensemble, chacun en ce qui le concerne, ne ménage aucun effort en vue de faire de notre Pays, la République Démocratique du Congo, un pays où il fait beau vivre. Car c’est encore possible !
Que l’Eternel Dieu bénisse la République Démocratique du Congo,
Que l’Eternel Dieu bénisse le peuple Congolais. »