Par Dorcas Nzumea.
Les propos tenus récemment par le diplomate rwandais en RDC, Vincent Karega, sur la responsabilité ou non des troupes rwandaises dans les massacres commis en 1998 à Kasika dans le Sud-Kivu, ne cessent de défrayer la chronique. Personnalités politiques, mouvements citoyens, activistes des droits de l’homme, tous en appellent à son expulsion du sol congolais. Après un long silence, le Gouvernement congolais a enfin délié sa langue et semble hausser le ton en affirmant que les bornes ont été dépassées et que le gouvernement congolais désapprouve la prise de position de ce diplomate.
« Nous pensons que les bornes ont été dépassées. Il ne faut pas assassiner les mémoires de Congolais. Notre gouvernement désapprouve les prises de position de cet ambassadeur Rwandais en RDC». C’est par ces mots que le porte-parole du Gouvernement congolais, Jolino Makelele a exprimé ce lundi 7 septembre 2020, l’indignation de la RDC en rapport avec les récentes sorties médiatiques du diplomate rwandais en RDC.
A en croire le ministre de la communication, Vincent Karega a été reçu par le chef de l’Etat qui lui a dit ce qu’il fallait en rapport avec ce problème. « l’ambassadeur a été reçu par le chef de l’Etat. Il y a des choses que je ne peux pas vous révéler. La seule certitude est qu’ il y a d’autres mesures qui seront prises en rapport avec ses prises de position que je ne peux pas dévoiler. Pour l’instant, nous attendons des mesures que le gouvernement Rwandais prendra à l’égard de cet ambassadeur», a-t-il laissé entendre. Et d’ajouter : «Ce que Vincent Karega dit n’est pas de nature à favoriser les bonnes relations entre la RDC et le Rwanda».
Alors que plusieurs personnalités du pays exigent son expulsion, Jolino Makelele prévient qu’aucune mesure de rétorsion n’est exclue pour l’instant, tout cela relève des secrets d’État et de la diplomatie. Mais il rassure par contre que le Gouvernement ne restera pas indifférent et les mesures à prendre seront proportionnelles aux agissements de cet ambassadeur.
Il a par ailleurs annoncé que l’affaire Karega sera évoquée en bilatéral en marge du mini-sommet de Goma. «C’est une question qui sera évoquée probablement pas dans la mesure où elle concerne que le Rwanda et la République Démocratique du Congo. Mais elle sera évoquée en bilatéral, je peux vous dire que le Chef de l’Etat y tient beaucoup», a affirmé Jolino Makelele.
Pour rappel, le diplomate rwandais avait, à travers un tweet soulevé un tollé général. Réagissant à un message posté par le blogueur Benjamin Babunga au sujet du 22e anniversaire du massacre de Kasika, Vincent Karega avait réagi : « incohérence flagrante entre image. Narratif simpliste pour des accusations graves. Accuser sans évidences s’appelle calomnie. Villages sans noms, 1100 morts avec deux noms. Circonstances de crimes et identité des criminels non dévoilée. Accusation ou propagande ??? ». Ce tweet a enflammé la toile avant que son auteur puisse le supprimer alors que les captures avaient été faites.
Le vendredi 4 septembre dernier, plusieurs mouvements citoyens dont la LUCHA et Filimbi, avaient organisé un sit-in à Kinshasa afin d’exiger l’expulsion immédiate de Vincent Karega du sol congolais. Un fort dispositif sécuritaire avait été déployé pour empêcher les manifestants à atteindre l’Ambassade du Rwanda et c’est à base des gaz lacrymogènes qu’ils ont été dispersés. L’on a noté un bilan des deux blessés graves, une dizaine de blessés légers, plusieurs interpellations et des pertes de téléphones.
Si alors le gouvernement central désapprouve la diarrhée verbale du sulfureux ambassadeur rwandais pour qui les sud-africains gardent un très mauvais souvenir dans l’assassinat de Camir Nkurunziza, qui était opposant au régime de Kagame, pourquoi la police congolaise a-t-elle gazé les manifestants pour protéger Vincent Karega, connu comme un homme de sales coups ?