Kongo central : le PG Mukolo somme Atou Matubuana de démissionner, mais…

Par Nzakomba.

Par sa lettre du 13 juillet dont référence n° 031/PG.C.CONST./01.23.03/SEC/2020, le procureur général près la Cour constitutionnelle, Mukolo Nkokesha Jean-Paul somme le gouverneur Atou Matubuana de déposer sa démission auprès du chef de l’État. C’est la conséquence de l’arrêt rendu par cette haute Cour sous R.CONST. 1171 du 29 mai 2020.

En effet, c’est sur demande du président de l’Assemblée Provinciale du Kongo Central que le PG près la Cour constitutionnelle s’est saisi du dossier. Selon les éléments qui ont motivé sa décision, il affirme qu’en l’absence d’un recours déposé au greffe de la Cour constitutionnelle s’opposant à l’acte de l’Assemblée ayant abouti à la destitution du gouverneur, l’arrêt y afférent devrait être exécuté.

« En application de l’article 94 de la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, qui dit ceci je cite : les arrêts de la cour sont publiés ai journal officiel, ils sont  immédiatement exécutoires. Le procureur général en poursuit l’exécution, je vous enjoins de déposer votre démission au Président de la république, chef de l’État, et de cesser ainsi d’exercer les fonctions de gouverneur de Province du Kongo Central », peut-on lire dans la correspondance.

Mais là où le PG faute, c’est lorsqu’il invoque l’article 160, alinéa 4 de la loi 064/006 du 9 mars 2006 (loi électorale), pour inviter le ministre de l’intérieur à désigner un intérimaire en vue d’assurer la continuité des services publics.

En effet explique Frédéric Bola, juriste et libre penseur souvent consulté par Scooprdc.net, l’article 160, alinéa 4 de la loi évoquée, telle que modifiée par la loi n° 17-013 du 24 décembre 2017, dispose que lorsque l’Assemblée provinciale adopte une motion de censure, le Gouverneur de province remet la démission de son Gouvernement au Président de la république dans les 24 heures et « le Gouvernement provincial, sous la direction du Vice-gouverneur expédie les affaires courantes ».

Il ajoute que l’article 160 de la Loi électorale doit être lue conjointement avec l’article 42 de la Loi 08-012 du 31 juillet 2008 sur la libre administration des provinces. En effet, l’alinéa 3 dudit article stipule que « lorsqu’une motion de défiance contre le Gouverneur est adoptée, le Gouvernement provincial est réputé démissionnaire ».

Ni la Constitution, ni la Loi électorale, ni la loi sur la libre administration des provinces, ni aucun autre texte dans l’ordonnancement juridique congolais ne prévoit la désignation par le Ministre de l’intérieur d’un intérimaire pour expédier les affaires courantes en cas d’absence, d’empêchement ou de démission du Gouverneur de province ou d’un Gouvernement provincial.

Si Atou Matubuana devra rendre le tablier, il reviendra constitutionnellement à son vice-gouverneur d’expédier les affaires courantes jusqu’à l’élection d’un nouveau gouverneur. Le ministre de l’intérieur n’a aucun pouvoir de nommer un gouverneur intérimaire, il violerait la loi.

Guerre entre la Cour constitutionnelle et la Cour de cassation

Le gouverneur Atou Matubuana ressemble à quelqu’un au bout d’une route qui trouva tout à coup deux chemins. Fallait-il prendre à droite, à gauche ou rester au centre ? Si, d’un côté la Cour constitutionnelle le somme de démissionner, de l’autre la Cour de cassation a joué en sa faveur en annulant tous les procès-verbaux ayant concouru à sa déchéance (lire les articles de scooprdc.net : «Kongo central : tous les PV des plénières de l’Assemblée provinciale tenues à l’hôtel Bilolo détruits» et «Crise institutionnelle au Kongo central : la Cour constitutionnelle ne contredit pas la Cour de cassation»).

cet imbroglio créé par le PG près la Cour constitutionnelle,  laquelle de deux décisions judiciaires le gouverneur Atou Matubuana doit-il respecter ? Débat ouvert pour les juristes !

  • Bendélé Ekweya té

À ne pas rater

À la une