Comme promis à ses lecteurs dans l’article «Secteur minier : halte au bradage de la SOKIMO», Scooprdc.net passe à l’acte 2 en donnant la fiche signalétique de la société AJN Resources à qui le Gouvernement congolais voudrait céder les actifs de la SOKIMO, le contexte d’octroi de ce marché et la complicité de certains officiels. Se joignant à leurs collègues de l’Ituri qui ont protesté dans leur déclaration du 20 avril dernier contre cette cession, les députés et sénateurs du Haut-Uele qui ont réagi, mercredi 24 juin, qualifie AJN Resources de société écran qui ne dispose d’aucun actif minier connu, ni d’aucune expérience avérée en matière de développement des gisements miniers aurifères ou autres, à l’exception du forage de son premier trou dans le cadre d’un petit projet de lithium.
Non sans raison, sur son propre site www.ajnresources.com, AJN se présente comme une société d’exploration et de développement, formée dans le but d’acquérir, d’explorer et de développer des ressources naturelles. Pire, sa capitalisation boursière ne serait que de près de 13,5 millions USD. Pour les députés du Haut-Uele, AJN Resources n’a fait que miroiter la SOKIMO. Et des experts d’estimer que s’il faut brader les réserves aurifères de SOKIMO évaluées à 10 milliards USD pour 15 millions USD recherchés en bourse, il serait mieux de recourir au Fonds de Promotion de l’Industrie (FPI) pour le financement de la relance de la SOKIMO entant qu’industrie minière. Au jour d’aujourd’hui, les créances détenues par les débiteurs de cet établissement financier de l’Etat congolais dépasse de 10 fois (au moins 150 millions USD), les l’argent mendié auprès d’AJN Resources.
Complicité et boulimie de certains officiels congolais
Le choix fait de gré à gré sur AJN Resources en violation de l’article 33 du Code minier qui impose pour ce genre de marché un appel d’offre, cache la gloutonnerie de certains officiels congolais disséminés dans de petites sociétés privées de mallettes (Pianeta Mining and Trading, Dathomir Mining Resources Sarl, Minor Sarl…) qui l’utilisent comme société écran pour recevoir en retour des commissions alors qu’en interne, mieux sur le plan national, ces 15 millions USD sont mobilisables.
Derrière ces petites sociétés privées de malettes, les syndicalistes de SOKIMO citent des noms comme ceux de Corneille Nangaa, Wivine Mumba, Pascal Beveraggi, Guy Loando, Annie Kitima.
Fatshi doit vite réagir
Au moment où Scooprdc.net rédige cet article, les syndicalistes de la SOKIMO lui confirment que certains titres miniers de leur société sont détenus par Pascal Beveraggi pour le compte de Pianeta Mining and Trading Sarl avec qui la SOKIMO a créé en joint-venture la société Kodo Resources. Et c’est cette société Pianeta qui veut passer le relais à AJN Resources.
Selon le communiqué de presse d’AJN du 6 février 2020, AJN compte lever en bourse un financement d’au moins 20 millions $CDN par l’émission d’actions nouvelles. Dans le mémorandum du 2 avril 2020, il est plutôt indiqué que l’introduction des actifs miniers en bourse permettra l’accès au cash-flow pour une première fois de 20 à 40 millions $CDN (soit environ 14 millions USD à 28 millions USD) par l’émission de titres au profit de tiers souscripteurs. Ce montant passe du simple au double sans aucune explication. Aussi, les activités minières exigeant souvent de lourds investissements, les montants envisagés d’être levés en bourse, même à hauteur de 28 millions USD, paraissent dérisoires pour réaliser des travaux de recherches et de développement de grande envergure dans le cadre des projets ciblés.
D’après les syndicalistes, le propre d’une société cotée en bourse est que ses actions s’échangent tous les jours de façon anonyme, sans que l’acheteur et le vendeur ne se connaissent nécessairement, ni ne se rencontrent physiquement, via une plateforme d’échanges informatisés. De toute évidence, chaque fois qu’il y aura émission d’actions nouvelles dans AJN pour lever des fonds, la participation de SOKIMO sera progressivement diluée. Et une fois les actifs miniers transférés à AJN, les flux de revenus de la SOKIMO deviendraient incertains. Les fonds levés en bourse ou les dividendes éventuels n’appartiendront pas à la SOKIMO mais à AJN. La SOKIMO ne pourra espérer rentabiliser ses participations ou actifs transférés à AJN et rémunérer son actionnaire, l’Etat congolais, que par la revente de ses actions avec un gain éventuel et donc, en définitive et paradoxalement, par sa sortie progressive des trois projets ciblés.
En définitive, la transaction considérée comporte ainsi d’énormes risques de perte de ses actifs par la SOKIMO qui ne sera pas elle-même cotée en bourse. Enfin, dans le contexte politique et judiciaire actuel, les questions d’opportunité, d’adéquation de la contrepartie reçue et de transparence risquent de se poser.