Alors qu’il n’a pas encore fini avec la Commission Défense et Sécurité de l’Assemblée nationale qui l’a auditionné lundi 19 mai et l’attend le 26 mai prochain pour répondre aux préoccupations des députés, au sujet de la recrudescence de la criminalité à travers le pays, notamment dans les grands centres urbains tels que Lubumbashi, Goma, Kinshasa sans oublier l’insécurité quasi permanente à l’Est du pays, le vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité, Affaires Coutumières, Gilbert Kankonde Malamba, est dans le viseur du député Modero Nsimba. Cet élu de Moanda au Kongo central lui a adressé une question orale avec débat en rapport avec les opérations de la Police Nationale Congolaise (PNC) au cours du mois d’avril 2020 au Kongo Central, précisément à Kisantu dans le territoire de Madimba, à Kinzau-Mvuete dans le territoire de Seke-Banza, à Songololo dans le territoire de Mbanza-Ngungu et dans la ville de Boma, lesquelles ont occasionné mort d’hommes dans les rangs des adaptes de Bundu dia Mayala, ex-Bundi dia Kongo.
Tel un justicier avec plusieurs rapports comme pièces à conviction sur les dérapages de forces de l’ordre, Modero Nsimba fournit un bilan déplorable des décès dus à ces dérapages des policiers dans les villes et localités citées ci-haut. «…il s’agit des morts de trop dont le Pays aurait dû se passer si cette opération de maintien de l’ordre avait été faite de manière professionnelle en tenant compte du principe constitutionnel ’’de la sacralité de la personne humaine’’ et ‘’de l’obligation par l’État de la respecter et de la protéger’. Ces nombreux morts auraient dû être évités d’autant plus que dans tous les territoires et villes où se sont déroulés les faits, l’opinion publique était déjà avertie plusieurs jours en avance sur la tenue des marches des adeptes de BDM et donc à plus forte raisons les services auraient dû mieux se préparer pour empêcher que se tienne encore, à ce jour, cette comptabilité macabre auquel nous soumet Notre Invité (Ndlr:Kankonde)», observe-t-il dans sa question orale avec débat
Évoquant la loi portant organisation et fonctionnement de la Police Nationale Congolaise, Modero Nsimba rappelle que le Commissaire Provincial et ses adjoints sont nommés, relevés de leurs fonctions et le cas échéant, révoqués par l’Ordonnance du Président de la République, sur proposition du Gouvernement délibérée en Conseil des Ministres, le Conseil Supérieur de la Défense entendu. Par là, il met en cause l’arrêté pris par Gilbert Kankonde le 24 décembre 2019 portant permutation et affectation des Commissaires Provinciaux et des Commissaires Provinciaux Adjoints de la PNC. Pour l’élu de Moanda, le VPM Gilbert Kankonde s’est arrogé indûment les prérogatives du président de la République, en enjambant le conseil des ministres.
«Après 12 ans d’accalmie au Kongo central, vous avez jugé bon, en toute illégalité de procéder à la permutation des Commissaires Provinciaux et des Commissaires Provinciaux Adjoints de la PNC, alors que ladite Loi ne vous en procure nullement compétence. Était-ce à dessein de mettre fin à ces 12 années de paix au Kongo Central ? Aucune autre raison plausible à votre arrêté pris en violation des deux Loi précitées ne me saute aux yeux. A titre de violation, vous vous êtes (a), arrogé le pouvoir dévolu au Président de la République contenu à l’article 67 de la Loi, (b), vous avez éludé le Conseil des Ministres et (c), vous vous êtes passé de l’avis du Conseil Supérieur de la Défense comme le veut l’article 54 de la Loi organique», charge-t-il Gilbert Kankonde avant de lui flanquer l’article 10 de cette Loi organique qui dispose que la PNC vérifie systématiquement la légalité des opérations qu’elle se propose de mener. Et de préciser que toute opération ou mission policière est couvert par un ordre opérationnel.
Avec cet argumentaire, le député Modero Nsimba finit par faire tomber une pluie des questions ci-après adressée à sa cible :
1) Pouvez-vous nous dire le contenu de l’Ordre opérationnel de ces opérations au Kongo central et précisément l’Ordre opérationnel de Songololo ?
2) Pouvez-vous nous présenter ces Ordres opérationnels ?
3) Quel est l’unité de la Police qui a effectué cette opération de Songololo ?
4) L’article 9 de la même Loi organique dispose que dans l’exercice de leurs fonctions, les agents de police ne font usage des armes qu’en cas d’absolue nécessité notamment lorsque des violences sont exercées contre eux. En sus, avant tout usage d’armes à feu, l’autorité légalement responsable du maintien de l’ordre fait trois sommations avant tout usage d’armes à feu.Pouvez-vous nous dire ce qui a motivé une attaque de nuit aux alentours de 02h00 à 06h00 du matin causant 15 morts et plus de 17 blessés graves et nous confirmer si toutes les conditions légales et réglementaires avaient été respectées ? D’autant plus que les victimes étaient rassemblées dans une maison la nuit et par conséquent ils ne constituaient aucun danger imminent nécessitant une attaque urgente.
5) Pouvez-vous nous informer de l’existence d’une enquête des services internes de la PNC par rapport aux violations constatées sur terrain et, si elle existe, quelle en est l’ issue ? Des sanctions internes ont-elles été prises ?
6) Pourquoi l’Administrateur du territoire de Songololo n’a pas été préalablement informé de ces opérations ayant causés tant de morts ?
7) Quelles sont alors les autorités administratives locales qui ont été associées à la gestion de ces opérations policières ? Que contiennent les rapports de ces autorités sur la gestion de ces événements, s’ils existent ? Avez-vous tenté d’établir les responsabilités à chaque niveau ? Avec tant de morts et de blessés de nos concitoyens il faut que les responsabilités de chacun soient établies.
8) Si pour sécuriser quelques bâtiments publics et véhicules officiels, vous avez sollicité le décaissement de plus de 9.000.000 USD pour achats des matériels anti-incendie entre-autres, alors que cela ne revêt d’aucun caractère d’urgence, qu’avez-vous déjà initié pour améliorer l’arsenal de la PNC en termes de matériel et armes non létales pour améliorer ses interventions de maintien et de rétablissement de l’ordre et ainsi éviter la mort inutile de nombreux concitoyens ?
9) Après toutes les observations et questions que je vous ai fournies, une me revient en boucle, celle de savoir qui a donné l’ordre de tirer sur le peuple d’abord ?
Ayant déposé sa question orale avec débat au bureau de l’Assemblée nationale le 19 mai dernier, le député Modero Nsimba n’attend que le bureau inscrive sa démarche à l’ordre du jour et interpelle le VPM Gilbert Kankonde pour qu’il vienne lui répondre en plénière. Le VPM s’en sortira-t-il alors qu’il a toujours difficile à convaincre ?