La société LIQUID TELECOM DRC est détentrice d’une licence de concession des services des télécommunications lui attribuée par le Ministre des PTNTIC en date du 05 février 2018, à travers l’Arrêté n° CAB/PTNTIC/EON/JA/Mmw/004/2018 en vue d’établir et d’exploiter des réseaux de distribution et de transmission à fibre optique sur les axes Goma-Bukavu, Inga-Muanda et Kasumbalesa-Lubumbashi-Kolwezi et des réseaux domestiques (rings) dans les villes de Kinshasa, Goma, Lubumbashi et Kolwezi.
Bien que disposant de ce droit d’établir ces réseaux à fibre optique, l’opérateur LIQUID TELECOM ne peut avoir accès à l’international pour écouler son trafic qu’à travers les passerelles construites par un opérateur désigné et gestionnaire des passerelles internationales avec lequel il devra signer un contrat qui déterminera les modalités techniques et financières de cette collaboration. Le cahier des charges annexé à la licence de cette société, en sa clause 9.3, justifie cette exigence par des raisons de souveraineté de l’Etat. L’exception à ce principe n’est admise que lorsque LIQUID TELECOM DRC doit écouler son trafic international à partir des villes et territoires dépourvus de ces passerelles (alinéa second de cette clause). Dans une telle hypothèse, il devra s’associer à l’Opérateur désigné pour construire et exploiter, à un contrat de type BOT (construire, exploiter et transférer), une passerelle de transit international.
En clair, suivant cette exigence, LIQUID TELECOM, pour l’écoulement de son trafic international est tenue de se connecter aux infrastructures de transit international de la SCPT, seul opérateur désigné à ce jour pour les passerelles internationales. C’est dans ce cadre que pour son trafic international devant être écoulé à travers l’Océan Atlantique, LIQUID TELECOM est tenue de passer par la station d’atterrage de l’opérateur public, SCPT se trouvant à MUANDA. Elle est donc obligée, à ce sujet, de négocier et conclure avec la SCPT un partenariat commercial, financier et technique. Cependant, dans les parties du territoire national où il n’existe pas de passerelles internationales établies par la SCPT (comme à Goma et Lubumbashi), LIQUID TELECOM doit solliciter la collaboration de cet Opérateur public pour construire avec elle, à travers un contrat de type BOT, une passerelle de transit de son trafic international. En l’absence d’un tel partenariat, LIQUID TELECOM ne peut pas disposer de ses propres infrastructures d’écoulement de son trafic international.
Cette exigence de recourir à la SCPT pour le trafic international permet à l’Etat de maintenir son contrôle sur ce segment des activités des télécommunications afin de lui garantir une visibilité sur les revenus générés dans ce secteur et de lui faire bénéficier des progrès technologiques dès lors qu’à la fin de ce partenariat de type BOT, l’Etat ou la SCPT devra acquérir les infrastructures établies à cet effet.
Depuis l’obtention de sa licence précitée, la société LIQUID TELECOM a déjà établi et exploite des réseaux de transmission à fibre optique sur l’axe Kasumbalesa-Lubumbashi et dans la ville de Goma. Elle écoule son trafic international par ses propres voies sans observer son cahier des charges. Bien plus, elle n’a jamais cherché à établir un partenariat avec la SCPT. En effet, à Kasumbalesa, son réseau est connecté à l’international via une liaison terrestre établie avec l’opérateur public zambien, ZAMTEL Telecom Ltd, dans lequel la filiale zambienne du groupe LIQUID TELECOM a des intérêts. Tandis qu’à partir de Goma, son réseau est connecté à GISENI (Rwanda). Ces deux connexions à l’international sont faites sans que l’opérateur public congolais, la SCPT, seul détenteur des droits d’implanter et exploiter les passerelles de transit international, ne soit intéressée ni associée par LIQUID TELECOM DRC. Cela constitue déjà une violation manifeste par cette société de son cahier des charges. Cet irrespect de ses obligations par LIQUID TELECOM DRC fait perdre à l’Etat congolais le contrôle sur le trafic international de cette entreprise et des recettes provenant de ce segment.
Au-delà de cette entorse à ses obligations de la licence, elle n’a pas encore établi les liaisons à fibre optique sur les axes Goma-Bukavu, Lubumbashi-Kolwezi et Inga-Muanda ni des réseaux domestiques à Kinshasa et à Lubumbashi.
Dans ce contexte d’inexécution fautive des obligations tirées de sa licence et du cahier des charges y annexé, LIQUID TELECOM DRC a néanmoins, par sa lettre LT/ADMIN/TK/26/007/19 du 15 juillet 2019 adressée au Président a.i de l’ARPTC, introduit une nouvelle demande de développement des nouveaux axes (Lubumbashi-Goma, Inga-Matadi-Noqui, Mwene-Ditu-Mbuji-Mayi), d’établissement d’un réseau FTTH à Lubumbashi et de construction d’une station d’atterrage à Muanda. Cet opérateur a sollicité en outre le droit de relier par fibre optique Muanda à Cabinda (Angola) via Nsiamfumu.
A cette époque, l’ancien Ministre des PTNTIC avait recommandé à l’ARPTC de ne pas s’écarter de l’esprit et la lettre de la licence précitée ainsi que du cahier des charges y annexé. Il a, du reste, instruit cet organe de vérifier si la société LIQUID TELECOM avait exécuté correctement ses obligations, plus particulièrement si elle avait réellement établi un partenariat avec la SCPT pour non seulement la connexion à l’international ainsi que pour la distribution et la commercialisation des capacités du réseau à fibre optique de la SCPT. Une lettre de l’ARPTC avait même été adressée à LIQUID TELECOM DRC pour donner des précisions sur la réalisation desdites obligations.
Cependant à cette correspondance de l’ARPTC, cette entreprise a répondu par sa lettre LT/ADNIN/TK/341/011/2019 du 08 novembre 2019 donnant des nouvelles orientations à son projet initial. Dans cette lettre, elle a précisé que la liaison Lubumbashi-Kolwezi devrait se faire dans le cadre du projet SNEL, le projet Goma-Bukavu dans un nouveau projet visant à relier Goma à Kananga et/ou Lubumbashi, le projet Matadi-Muanda devrait désormais être exécuté en mutualisant avec le projet Facebook. Elle a précisé qu’elle devrait relier Matadi à Noqui en Angola.
Ainsi que vous pouvez le constater, cette démarche de la société LIQUID TELECOM DRC cherche à flouer l’Etat congolais. Cette société ne vise pas la connectivité des populations congolaises. Elle poursuit plutôt la réalisation des visées de la Multinationale LIQUID TELECOM consacrées dans son projet gigantesque : « One Africa » Broadband network (Un réseau unique africain de transmission à large bande).
En effet, il n’existe pas de connexion terrestre directe en fibre optique entre les pays africains de l’Est et ceux de l’Ouest. Toute communication entre eux passe obligatoirement par Londres. D’où le temps de latence long pendant les communications entre les pays de ces parties de l’Afrique. Pour les opérateurs des TIC établis en Afrique, cette absence de connexion terrestre en fibre optique impacte négativement et grandement à la qualité de leurs services. D’où cette ambition du groupe LIQUID TELECOM à établir un réseau terrestre de transmission à fibre optique sur le continent africain pour palier à cette insuffisance.
Pour réaliser ce projet de construction de réseau unique, la Multinationale LIQUID TELECOM, dont la majeure partie du réseau de transmission internationale est établi dans la côte Est de l’Afrique, trouve une opportunité en la République Démocratique du Congo qui dispose d’une sortie sur la côte Ouest. Sa filiale congolaise étant détentrice d’une licence d’établissement et d’exploitation des réseaux à fibre optique, cette multinationale voudrait profiter de cette donne pour connecter ses réseaux à fibre optique de la Tanzanie et de la Zambie à l’océan Atlantique.
Comme relevé ci-dessus, le réseau de sa filiale congolaise ayant la connexion terrestre avec la Zambie, une grande opportunité trouve sa source sur l’existence d’un accord entre celle-ci et la SNEL pour l’exploitation du câble à fibre optique de cette dernière implanté sur la ligne de garde du réseau électrique très haute tension de 1.700 Km partant des centrales d’Inga jusqu’à la station de conversion de Kolwezi, reliée à son tour à Lubumbashi et Kasumbalesa. Cet accord offre donc à LIQUID TELECOM DRC l’occasion d’acheminer, par fibre optique, le trafic provenant de la Zambie et la Tanzanie jusqu’à Inga. Disposant d’un droit de construire un réseau à fibre optique sur les axes Inga-Muanda, elle sollicite en outre les axes Matadi-Muanda et Matadi-Noqui (Angola). Avec le nouvel aménagement de de sa licence, cette entreprise sera capable de terminer le trafic international en provenance de ces pays vers l’Océan Atlantique par deux voies : Muanda sur le câble sous-marin WACCS et Noqui (Angola) sur le câble sous-marin SAT 3. Ainsi donc, cette Multinationale, à travers sa filiale congolaise pourra assouvir son ambition et réaliser d’importants revenus tirés de ce transit international sur le sol congolais du trafic qu’elle aura récolté de tous les pays d’Afrique de l’Est et Australe sans le faire passer par Londres. La meilleure qualité des services et la réduction de temps de latence qu’offre une telle connexion terrestre permettra à cette multinationale vers elle tout le trafic international échangé entre les opérateurs africains. Ainsi, la RDC, pays géographiquement situé au centre de l’Afrique, pourra constituer un hub par lequel devra passer tout le trafic international et interconnecté du Continent. Une telle activité lucrative pour cet opérateur ne pourra jamais profiter à la RDC si l’Etat congolais n’est pas partie prenante dans cette activité.
Sans analyser l’impact de la nouvelle demande de LIQUID TELECOM DRC, l’ARPTC vient de prendre une décision qui soumet à la signature du Ministre des PTNTIC, Augustin Kibassa, un avenant à la licence de cet opérateur l’autorisant à construire une station d’atterrage à Muanda et à connecter son réseau de transmission à fibre optique à l’Angola via l’axe Matadi-Noqui et ce, au préjudice des intérêts de l’Etat congolais et de son Exploitant public la SCPT. L’ARPTC a-t-elle pensé un seul instant à ces intérêts ? N’a-t-elle pas fait une projection sur les apports dans le secteur de transmission par fibre optique que la SOCOF offrira très prochainement à la RDC ? Pourquoi, ne peut-elle pas favorisé le Partenariat Public-Privé pour la réalisation d’un tel projet qui brassera du cache ?
S’il demeure vrai que la République Démocratique du Congo a besoin de favoriser l’apport des capitaux privés pour lui permettre de favoriser le développement des infrastructures de transmission à fibre optique et accroître la connectivité large bande de ses populations, il reste que ces investissements doivent lui profiter financièrement et techniquement. C’est pour cet objectif que la licence et le cahier des charges attribués à la société LIQUID TELECOM DRC avaient insisté sur la nécessité pour cette entreprise de s’associer à la SCPT pour la construction et l’exploitation des passerelles de transit international. Ce qui devra permettre à l’Etat congolais non seulement d’avoir un contrôle sur le volume des revenus générés par le trafic qui y est cheminé et plus tard d’hériter des équipements implantés sur la base du contrat BOT qu’elle devra construire avec la SCPT. Mais hélas, le Régulateur congolais ignore cette donne importante pour le pays sous prétexte qu’il aurait obtenu l’aval de la Présidence de la République. On accuse ainsi les dirigeants de l’ARPTC d’être des mercenaires dont le souci principal est de s’enrichir sur le dos de la Nation congolaise, surtout qu’ils sont non seulement fin mandat, mais surtout intérimaires.
La décision de l’ARPTC visant à octroyer à la société LIQUID TELECOM le droit d’établir seule des passerelles internationales viole manifestement la législation en vigueur sur les télécommunications et les TIC en RDC. Car, aucun texte légal ni réglementaire ne prévoit la possibilité d’octroi aux particuliers des licences ou autres titres d’établissement et d’exploitation des passerelles de transit international à fibre optique (station d’atterrage et autre type d’équipements de transit à fibre optique). Par ailleurs, aucun texte de loi ni réglementaire sur la nomenclature des taxes et droits dus au Trésor ne prévoit une taxation sur le droit d’établissement et exploitation des stations d’atterrage. On se demande quel sera le texte légal qui va régir l’activité qu’on veut confier à LIQUID TELECOM ou encore servira à la taxation de l’avenant à la licence ou aux revenus qui seront tirés de cette activité d’exploitation de la station d’atterrage.
C’est ici l’occasion de rappeler combien l’Etat congolais a perdu des revenus (65.000.000 USD) pour le renouvellement de la licence 2G de Vodacom. En effet, l’ARPTC a fait perdre cette somme à l’Etat congolais en prorogeant de 10 ans la durée de la licence 2G de cette société, à travers un avenant à cette licence, sans base légale ni réglementaire. Cela a été un grand jackpot réalisé par l’ARPTC et le Ministre des PTNTIC. En effet, ce sont les mêmes animateurs actuels de l’ARPTC, qui, privilégiant leurs intérêts personnels, ont minoré les droits dus à l’Etat. N’eût été la clairvoyance du Ministre Emery OKUNDJI, l’Etat congolais aurait tout perdu. Il y a lieu de noter que c’est l’actuel Président a.i de l’ARPTC qui était l’homme-orchestre de ce coulage des recettes. Et il veut réitérer ses exploits dans le dossier LIQUID TELECOM.
Profitant des faiblesses du Ministre actuel des PTNTIC et de l’absence des personnes averties et rodées en télécommunications autour de celui-ci, le Président a.i fait passer des choses inacceptables qui hypothèquent les intérêts de l’Etat congolais. Depuis un temps, ce sieur a fait adopter plusieurs décisions où l’ARPTC s’attribue des pouvoirs réglementaires strictement réservés au Ministre des PTNTIC. Il en est le cas de la procédure d’octroi des autorisations et autres décisions récemment prises par cet organe et publiées au Journal Officiel. L’ARPTC est devenue l’arbre à scandale de la présidence de la République. Le Président a.i ne cesse de crier à qui veut l’entendre qu’il bénéficie de l’aval et de la confiance du Directeur de Cabinet du Chef de l’Etat.
Il est grand temps que le Chef de l’Etat procède au changement des animateurs de cette structure de régulation des télécommunications dans notre pays afin de booster ce secteur. Cette nécessité est d’autant plus importante que le collège actuel de l’ARPTC a déjà épuisé ses deux mandats légaux. Il vit dans une période de « glissement ». C’est sous cette période d’incertitude quant à leur avenir et n’ayant pas d’interlocuteur averti à la tête du Ministère des PTNTIC, l’équipe sortante, avec le bénédiction des frères à la présidence de la République, s’adonne à poser des actes contraires aux intérêts de la République. Cette nécessité de réforme de l’ARPTC passe également par la promulgation de la nouvelle loi sur les télécommunications et les TIC en RDC. Ce texte réunit déjà toutes les conditions constitutionnelles de sa promulgation. Ce défaut de promulgation présente des opportunités aux personnalités comme l’actuel Président a.i de l’ARPTC de poursuivre le pillage de la RDC.