Par Ginno Lungabu.
Le ministre de la Recherche Scientifique et Innovation Technologique, José Mpanda Kabangu, a défendu et obtenu lors du conseil des ministres tenu jeudi 20 février dernier, l’accord pour le redémarrage du Réacteur Trico II du Commissariat Général à l’Energie Atomique et du Centre Régional d’Etudes Nucléaires de Kinshasa (CGEA/CREN-K).
Acte salué par le numéro 1 du CGEA/CREN-K, le professeur Vincent Lukanda Mwamba. « Je commence par saluer la vision du Chef de l’Etat de moderniser la RDC, la perspicacité du premier ministre qui est un professeur d’université et connaît l’importance de cet outil, mais aussi le dynamisme du ministre de la Recherche scientifique et Innovation Technologique qui vient de faire un coup de maître en défendant ce projet », a-t-il déclaré au lendemain de l’aval du conseil des ministres.
Ce projet de redémarrer le Trico II bien que salué, n’a pas cependant échappé à des critiques exacerbées dans tous les sens, allant de l’état obsolète de ce réacteur, en passant par le danger d’embraser tout Kinshasa qu’il présenterait, pour finir par la sécurité environnementale du site menacé par une vaste érosion.
Toutes ces critiques sont balayées par les experts du CGEA/CREN-K qui expliquent que les experts de l’Agence Internationale à l’Energie Atomique (AIEA) viennent chaque année inspecter le CGEA/CREN-K. Cette agence a fait des recommandations au CGA/CREN-K avant le redémarrage du Trico II, lesquelles sont déjà suivies à plus de 60%. Si le réacteur était obsolète, les experts de l’AIEA le diraient et n’accepteraient pas son redémarrage, explique-t-on au CGEA en précisant que l’aval de l’AIEA exclut toute crainte sur l’état obsolète du réacteur qui, selon l’estimation, a encore une durée de vie de plus de vingt ans.
Quant au danger d’embraser tout Kinshasa, les experts du CGEA font la part de choses entre une Centrale nucléaire dont la crainte émise est évidente et un centre nucléaire comme celui du CREN-K ne disposant que d’un réacteur de recherche scientifique. «Même s’il est vrai qu’il y a présence d’uranium, mais son taux est très faible pour menacer gravement la vie », expliquent toujours les experts du CGEA/CREN-K.
Concernant enfin l’environnement menacé par une érosion, les experts du CGEA rassurent que la progression de celle-ci a été déjà stoppée et qu’à ce jour aucune crainte ne peut être émise. « Le site est bien sécurisé et nous nous attelons à accomplir totalement les recommandations de l’AIEA en attendant le financement du Gouvernement pour amorcer les travaux du redémarrage du réacteur Trico II, lesquels nous prendront 18 moins si tous les moyens financiers sont disponibles », garantissent les experts du CGEA/CREN-K.
Pourquoi redémarrer ce réacteur Trico II ?
Il faut d’abord dire que ce réacteur acquis sur fonds propres du gouvernement congolais, zaïrois à l’époque, a été mis en fonctionnement pour la première fois le 24 mars 1972. Temporairement mis en arrêt depuis 2004 pour des raisons techniques de sécurité et de sûreté, malheureusement cet arrêt deviendra élastique jusqu’à constituer une inquiétude pour la communauté internationale en ce qui concerne la sûreté et la sécurité. « Un réacteur en activité est moins dangereux que celui en état d’arrêt », soutient-on mordicus au CGEA en expliquant clairement que lorsqu’un réacteur est éteint, il y a fort bien de chance qu’on vole ou soustraie les combustibles nucléaires contrairement que lorsqu’il est en activité.
Ainsi donc, la nécessité de redémarrer ce réacteur Trico II répond non seulement à l’impératif de recouvrer son leadership dans le domaine nucléaire mais aussi à celui d’améliorer ses services à la communauté nationale et régionale. En effet, redémarré et en activité, le réacteur Trico II aidera dans les domaines de l’agro-industrie, de la santé et des mines.
Concrètement, l’apport de ce réacteur dans le domaine minier c’est de caractériser des minéraux avant exportation, en y décelant les autres composantes minéralogiques associées et valorisables dont la commercialisation à l’exportation ajoutera une plus-value aux minéraux.
Aussi, ce réacteur permettra la production de radio-isotopes pour répondre à la demande locale et régionale dans les domaines industriel, médical, agronomique et de la recherche scientifique. Tout comme il sera un appui à l’enseignement et à la formation des étudiants provenant de plusieurs institutions et facultés (Sciences, Polytechnique, Médecine, Pharmacie, Agronomie, Sciences et Technologies Nucléaires…) et en même temps préparer le pays à s’orienter vers l’électricité d’origine nucléaire.
Et sur le plan du leadership, le démarrage du Trico II permettra la redynamisation du caractère régional du Centre Régional d’Etudes Nucléaires de Kinshasa (CREN-K) dont la RDC détenait le monopole dans la région parce que le réacteur Trico II a été la première installation en Afrique.
Récemment, les russes viennent de doter le Rwanda d’un réacteur nucléaire. Même si la question de plusieurs analystes et spécialistes nucléaires de savoir avec quel uranium ce réacteur rwandais fonctionnera-t-il ne trouve pas encore des réponses, l’accusation de la RDC par les Américains de négligence dans la gestion du secteur nucléaire et leur volonté exprimée du démantèlement pur et simple du réacteur Trico II et le rapatriement de tous les combustibles, ne sont pas anodines. D’où le Gouvernement congolais devra s’activer et anticiper pour ne pas donner raison aux Américains et autres russes qui auraient un regard vers le Rwanda. 3.408.200USD comme budget du redémarrage du Trico II, ne sont pas de la mer à boire !