Plus de deux semaines après l’installation du Gouvernement, le coordonnateur du Front Commun pour le Congo (FCC), Néhémie Mwilanya, a accordé une interview exclusive au Magazine Jeune Afrique. De l’origine et objectif de la création du FCC, de la coalition avec CACH, de l’aperçu et des défis du Gouvernement, des relations avec les partenaires extérieurs de la RDC, Néhémie Mwilanya n’a éludé à aucune question du journaliste.
S’agissant du FCC, Néhémie Mwilanya soutient que c‘est le résultat d’une volonté de l’ancien président de la République, Joseph Kabila, son initiateur, de rassembler, bien au-delà des clivages politiques, tous ceux qui sont soucieux de préserver les acquis de ses 17 ans de règne. Et énumérant ces acquis, le coordo du FCC cite la paix et la stabilité, les prouesses démocratiques et les réformes pour la bonne gouvernance politique et économique cristallisées, selon lui, autour de la décentralisation territoriale effective et des différentes structures et mécanismes de régulation de la gestion économique et financière du pays.
Se frottant les mains, l’ancien directeur de cabinet de Joseph Kabila salue les prouesses de 16 formations sur les 220 que compte le FCC qui ont ramené à elles seules, les deux tiers de la Majorité parlementaire actuelle. « Nous avons le sentiment, de toute évidence, de porter les aspirations profondes de la société congolaise », déclare-t-il pour appuyer le sens existentiel du FCC.
Quant à la coalition avec le Cap pour le Changement (CACH) dont il se félicite d’ailleurs du succès réalisé lorsqu’il déclare que « le bilan de l’alliance est donc, à ce jour, largement positif », Néhémie Mwilanya souligne qu’elle s’inscrit dans la même logique de rassemblement patriotique en vue de la stabilité et du développement du pays. « La solidité de cette alliance réside dans la clarté de la vision stratégique, des objectifs et des moyens pour les atteindre », déclare-t-il tout en révélant que cette coalition est le résultat d’un long processus de négociation entamé depuis 2015 en Italie puis en Espagne (NDLR : négociations secrètes entre le PPRD et l’UDPS à Venise et Ibiza).
Vantant le succès de cette coalition FCC-CACH, Néhémie Mwilanya déclare : « pour la toute première fois de l’histoire du pays, on a parlé d’abord ‘’programme’’ avant de parler ‘’partage des responsabilités’’ en RDC ». Aussi : « pour la première fois dans l’histoire de la RDC, une femme proposée par Joseph Kabila a été élue à la présidence de l’Assemblée nationale, madame Jeannine Mabunda Lioko, qui est pas ailleurs membre du FCC ». Et enfin : « …70% des parlementaires ont moins de 45 ans. J’y vois, personnellement, une volonté claire de la part des dirigeants de la coalition, particulièrement de l’ancien président Kabila, de mettre en œuvre son credo de renouvellement progressif de la classe politique de la RDC, ce qui ne peut avoir que des effets bénéfiques à moyen et long terme ».
Scrutant le Gouvernement Ilunkamba, Néhémie Mwilanya lui donne trois défis à relever : le premier, c’est la consolidation de la paix et de la stabilité. En effet, le coordonnateur du FCC estime que c’est la condition indispensable afin de pouvoir conduire une stratégie efficace de développement de la RDC sur la durée et assurer la cohésion nationale.
Le deuxième défi pour lui que le gouvernement devra relever, c’est le social. Là il estime que Sylvestre Ilunga Ilunkamba et son équipe doivent donner des réponses aux nombreuses attentes de la population, notamment la création d’emplois pour les jeunes, l’amélioration du niveau et des conditions de vie c’est-à-dire le logement, l’éducation, la santé, l’accès à l’eau et à l’électricité… Ce deuxième défi, pense Néhémie Mwilanya, passe par des reformes courageuses dans le secteur de la justice en vue de lutter efficacement contre la corruption qui occasionne le coulage des recettes de l’Etat.
Comme troisième défi, le coordonateur du FCC le situe sur le plan politique. Il préconise à cet effet la réduction des dépenses liées aux élections. « Le coût des élections nous semble excessif et nous pensons qu’il faut réduire les dépenses liées aux procédures électorales et à l’elasticité même du processus électoral dont le cycle compte pas moins de neuf scrutins. L’ancien président Joseph Kabila l’a toujours souligné », déclare-t-il.
Néhémie Mwilanya n’est pas non plus d’accord avec la prolifération des partis politiques qui, la plupart sont sans assises ni idéologies réelles. Pour lui, c’est une pesanteur à dégager absolument, en vue, dit-il, de permettre à ces partis de jouer efficacement leur rôle constitutionnel de concourir à l’expression de suffrage, de renforcer la conscience nationale et de participer à l’éducation civique.
Toujours sur le plan politique constituant le troisième défi du Gouvernement Ilunkamba, Néhémie Mwilanya propose aussi la réforme de la décentralisation pour éviter aux provinces les dysfonctionnements décriés. « Il faut repenser le système de manière à renforcer également la transparence dans la gestion des ressources allouées aux provinces, tout en gardant l’objet crucial de mettre fin à l’imposition des décisions depuis la capitale », dit-il en insistant sur la transformation des mentalités des Congolais.
Concernant enfin les relations avec les partenaires extérieurs, l’ancien directeur de Joseph Kabila les veut saines et respectueuses. « …Il y a eu aussi dans le passé des malentendus. Il est temps de tourner la page. Je pense que l’alternance réussie et pacifique constitue une réelle opportunité pour bâtir une nouvelle étape dans la coopération avec nos partenaires extérieurs, sans préjugés bien entendu, selon le principe gagnant-gagnant et dans le respect mutuel », déclare le coordonnateur du FCC.
Innocent Olenga.