L’annonce était faite en grande pompe. La Société Minière de Bisunzu (SMB) était alignée au programme parallèle du 13ème forum international sur les chaînes d’approvisionnement en minerais responsable qui se tient du 23 au 26 avril à Paris. Une grande première pour une entreprise privée exclusivement congolaise, acheteuse et vendeuse des minerais stannifères au Kivu. Une bonne occasion lui était accordée pour briser le joug de son enclavement identitaire. Une initiative géniale en management.
La présentation de la SMB aurait dû être un cadre de fierté pour plus de 200 ressortissants de la RDC présents au forum. Mais hélas, tout a tourné au vinaigre. Un spectacle honteux. Une véritable débâcle pour la SMB et la RDC. Une désolation pour les Congolais. Tenez : dans une salle qui devrait accueillir 300 personnes, il n’y a eu que moins de 20 personnes. Le modérateur de la séance choisi pour la circonstance bien que pressé par le temps imparti, était fatigué d’attendre les orateurs qui n’étaient pas dans la salle. On pouvait apercevoir parmi les panélistes à la tribune, le DG de la SMB, Ben Mwanga Chuchu très troublé, car la salle était vide, alors que la conférence de l’OCDE a connu un grand engouement cette année. Plus de 2000 personnes de plusieurs nationalités étaient présentes dans d’autres salles et dans les couloirs. La conférence de l’OCDE n’a jamais rassemblé autant de personnes depuis 2015. Tous les intervenants dans la filière de 3t et l’or ainsi que les responsables des structures internationales dont Matthew Chamberlain, PDG de London Metal Exchange et Gilliam Coldwell, directeur de Global Witness.
La SMB humiliée
Rien n’a marché pour la SMB. Est-ce un signe indien avec les esprits de nombreux creuseurs, victimes des actes de cette entreprise ? Le secrétaire général aux Mines, Joseph Ikoli qui était arrivé en retard dans la salle était prié de rejoindre les panélistes sur le podium afin de soutenir la SMB. Mais, est pris qui croyait prendre, dit-on. Bien qu’ayant commencé par une panégyrie de la SMB comme étant la plus grande entreprise minière au Kivu, soudain, c’est un revirement de position. Le chef de l’administration des Mines s’est attaqué ouvertement à la SMB de n’avoir pas encore transmis au ministère des Mines son rapport d’activités de 2018. Sans s’arrêter, il a rajouté et brossé le tableau sombre des démêlés récurrents et interminables avec les creuseurs impayés par la SMB, ses conflits avec la Coopérative de Masisi et d’autres coopératives de la contrée, les dossiers des minerais volés dans des concessions d’autrui,…Joseph Ikoli s’est ressaisi bien qu’en retard. Pour lui, ce tableau sombre constitue un épouvantail de « conseils prodigués à un ami -SMB-». Pourtant, tout le monde connaît que la SMB ne respecte pas la due diligence. Ne dit-on pas qu’ « on ne triche pas avec la vérité ? ». Arrivé à l’étape des questions-réponses, la première question soulevée dans la salle était celle de Paul Mabolia Yenga, coordonnateur de la Cellule Technique de Planification minière qui a demandé à la SMB de produire les statistiques de production et d’exportation des minerais pour l’année 2018 tout en exigeant la vérité sur les conteneurs saisis dans les différents postes frontaliers de certains pays de transit.
Ironie du sort !
Comment les officiels congolais du ministère des Mines pouvaient-ils être les premiers à tarauder et à maltraiter la SMB à l’étranger? Telle est l’interrogation d’un observateur dans la salle. Les méfaits de la SMB sont décriés depuis des années. Cela a suscité une avalanche de critiques vis-à-vis de l’entreprise et de la RDC. Le naufrage est donc total. La SMB a passé un moment de sa propre destruction.
On commet les dégâts et on accuse la presse d’enflammer la situation
L’enfer, c’est toujours les autres. Au lieu de tirer des leçons pour améliorer le travail, Ben Mwanga Chuchu a trouvé le bouc émissaire : la presse congolaise. Cependant, le moment et les circonstances étaient mal choisis. Pendant qu’il cherchait à s’attirer la sympathique attention de grands acheteurs des minerais de 3t, les images des creuseurs dans la rue réclamant leur payement faisaient le tour de la toile. Il fait la politique de l’autruche, alors que tout est sur la place publique.
La Rédaction