RDC : la loi Sesanga sur les manifestions publiques déboutée par Amnesty International

Dans son analyse juridique de la législation de la RDC sur le droit à la liberté de manifestation publique rendue publique ce vendredi 12 octobre, Amnesty International remet en cause le contenu de cette loi proposée par le député Delly Sesanga Himpung , pour non-respect des normes internationales relatives aux droits humains par la législation et les politiques nationales. Renvoyée par le chef de l’État Joseph Kabila au parlement pour seconde lecture, cette loi visant à fixer les mesures d’application de droit à la liberté de manifestations publiques (loi Sesanga) venait d’être passée au peigne fin par les experts de l’organisation de droits humains qui l’ont déclarée contraire à la constitution de la RDC.

Dans sa motivation, l’organisme accuse sans ambages cette loi de faire le lit de dirigeants actuels, qui jusqu’à ce jour continuent de soumettre les manifestations publiques à une autorisation préalable, violant ainsi l’article 221 de la constitution qui dispose que les textes législatifs et réglementaires en vigueur restent valables à condition qu’ils ne soient pas contraires à la nouvelle constitution. » Bien que présentée par celui qui en est à l’initiative comme une avancée importante visant à doter la RDC d’un cadre juridique approprié pour l’exercice du droit à la liberté de réunion pacifique, la proposition de loi Sesanga est loin de respecter le droit International et les normes y afférentes, ainsi que la constitution de la RDC elle-même  » peut-on lire dans la note d’Amnesty International.

Alors que tout régime de déclaration préalable, comme celui qui est prévu à l’article 26 de la constitution de la RDC a pour seul but de permettre aux autorités de faciliter l’exercice de ce droit et prendre de mesures nécessaires pour protéger la sécurité et l’ordre publics, la loi Sesanga par contre dans sa forme actuelle ne ferait qu’officialiser les violations de ce droit. Tenez par exemple, cette loi prévoit l’invalidité de la déclaration préalable si les organisateurs d’une manifestation pacifique ne satisfont pas aux conditions fixées à l’article 10 (fournir les identités, l’adresse, le téléphone ou le mail des organisateurs) d’une part, et d’autre part les organisateurs risquent de lourdes peines s’ils ne se conforment pas à ces conditions purement administratives. Or la RDC en tant que signataire des accords et traités internationaux dont le pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), l’article 215 de la constitution prévoit que les traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois nationales.

En voulant responsabiliser les organisateurs de manifestations publiques en cas de débordement, la loi Sesanga n’est pas conforme aussi à cet égard aux normes internationales qui veulent que « nul ne devrait être tenu responsable pénalement, civilement ou administrativement pour le simple fait d’organiser un mouvement de protestation pacifique ou d’y participer » comme l’indique la CADHP : « les rassemblements ne sont pas régis par des dispositions pénales autres que les clauses d’application générale du code pénal….La responsabilité est personnelle. Ni les organisateurs d’un rassemblement public, ni leurs partisans ne sauraient faire l’objet d’aucune sanction pour des actes commis par d’autres« .

Voilà pourquoi pour toutes ces anomalies, Amnesty International recommande à la RDC d’intégrer à sa législation nationale les principes et les règles établis par les organes internationaux, tels que la CADHP, en mettant en place des lois et des politiques exhaustives sur le maintien de l’ordre et le recours à la force lors de rassemblement. En attendant, la loi Sesanga risque d’être une mort-née, si elle n’est pas en conformité avec les dispositions pertinentes des traités et accords internationaux. D’ailleurs, depuis 2015 qu’elle a été renvoyée pour seconde lecture, elle a été mise au tiroir.

Nzakomba

  • Bendélé Ekweya té

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