Nationalité congolaise : mettre fin à la politique d’autruche

Recevant les députés de la Majorité présidentielle, lundi 16 avril 2018, le Chef de l’Etat a mis le dossier de la nationalité sur la table. « Ou bien on respecte la constitution sur le dossier nationalité ou on interroge le peuple par voie du referendum », a tranché Joseph Kabila. Evoquant à son tour la question de la nationalité congolaise, mardi 24 avril, lors de son meeting à la Place Sainte Thérèse à Ndjili, le président de l’UDPS Félix Tshisekedi voit mal qu’on renie la « congolité » à certains compatriotes qui, pour raison de sécurité et autres avantages dans les pays d’accueil, ont décidé d’acquérir les nationalités desdits pays. Il estime que la question est à débattre froidement à l’Assemblée nationale avec beaucoup de lucidité.

En effet, c’est depuis début 2007 que l’Assemblée nationale a traité hypocritement le problème de la nationalité congolaise conformément à la constitution, posé par José Makila Sumanda, actuel vice-premier ministre et ministre des Transports et Voies de Communication. Le moratoire décrété par les députés nationaux avec la bénédiction de Vital Kamerhe, alors à l’époque président de la Chambre basse du Parlement. Raison : protéger ceux des leurs et certains membres du gouvernement possédant d’autres nationalités. Cette politique d’autruche appliquée pendant plus de dix ans en violation flagrante de l’article 10 de la constitution démontre ses limites avec l’affaire Moïse Katumbi dont la « congolité » est déniée à cause de la nationalité italienne qu’il a détenue jusqu’en 2016. Deux options : soit ouvrir la boîte à Pandore pour tout le monde (Ndlr : ils sont nombreux au Parlement et au gouvernement à détenir au moins deux nationalités), ou alors on change les dispositions de l’article 10 de la Constitution.

Pour bon nombre de Congolais, la deuxième option semble propice pour mettre définitivement fin à cette polémique qui  n’honore pas la Nation congolaise. Selon des enquêtes, la plupart de Congolais vivant à l’étranger ont opté pour la nationalité des pays d’accueil, simplement pour faciliter certaines démarches administratives ou s’assurer une sécurité temporelle pendant leur séjour à l’étranger. Dans beaucoup de pays africains ou même européens, détenir autant de nationalité ne pose aucun problème. Ce qui fait même que dans la plupart des pays de l’Afrique de l’ouest, des citoyens détenant officiellement d’autres nationalités, peuvent briguer le mandat présidentiel et se retrouver à la tête du pays sans que cela ne fasse polémique. Le cas de George Opong Weah né libérien, devenu Français par obligations contractuelles de son travail de footballeur, puis américain par l’histoire qui lie le Libéria aux USA après l’abolition de l’esclavage.

Les USA, première super puissance du globe ont eu il n’y a pas deux ans, un président afro-américain, Barrack Obama, dont le père est Kenyan. Ce noir a dirigé la grande Amérique pendant deux mandats durant. L’ancien président français, Nicolas Sarkozy, tout le monde sait qu’il a des origines hongroises. Kenneth Kaunda, le tout premier président zambien, est d’origine malawite, mais celui qui a arraché l’indépendance des mains des Anglais. Egalement Jerry Rawlings, écossais de par ses origines était président du Ghana.

D’ailleurs, beaucoup de joueurs professionnels congolais détiennent une double nationalité. Ça ne les empêche pas de jouer dans l’équipe nationale, les Léopards. Pourquoi ne pas garder la même logique que de s’en tenir à une disposition qui ne colle pas avec la réalité ? Pour certains analystes, l’idée de retoucher l’article 10 de la Constitution pour l’adapter et la conformer à la réalité n’est pas mauvaise. Mais ils estiment que le contexte politique actuel ne s’y prête pas avec une majorité au pouvoir en quête de toute opportunité susceptible de maintenir son autorité morale au Palais de la Nation. Autrement dit, retoucher l’article 10 maintenant, ouvrirait sans doute la brèche à la révision d’autres dispositions de la Constitution qui énervent présentement les détenteurs du pouvoir.

JP Seke et Owandi

  • Bendélé Ekweya té

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