Entre le directeur démissionnaire de l’école doctorale de l’Université Protestante au Congo (UPC) et le recteur de cet Alma Mater, c’est un feuilleton qui semble loin d’en finir. Les deux professeurs se lancent des flèches au sujet de la soutenance de thèse de doctorat en Economie par l’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo, le 03 février dernier. Après sa lettre de démission de l’école doctorale en deux pages motivée par les irrégularités procédurales ayant émaillé cette soutenance, le professeur Evariste Mabi Mulumba revient à la charge avec une autre lettre, cette fois-ci en quatre pages à laquelle sont jointes trois annexes, pour contre-attaquer l’accusé de réception aussi en deux pages du recteur de l’UPC, le professeur Ngoy Boliya. « Je me rends compte que vous êtes le principal responsable des dysfonctionnements apparus dans la conduite du dossier du doctorant Matata Ponyo Mapon en démontrant votre ignorance du texte légal de référence sur l’organisation des matières relatives au Doctorat », écrit Mabi Mulumba à Ngoy Boliya.
Le professeur sénateur regrette que Monseigneur le professeur se réfère au Vade-Mecum en lieu et place de l’arrêté ministériel portant normes d’opérationnalisation des enseignements du 3ème cycle dans les établissements d’enseignements supérieur et universitaire en RDC ; lequel arrêté pris à l’époque de Matata premier ministre, par son propre ministre de l’ESU, le professeur Théophile Mbemba Fundu. Annexant cet arrêté à sa lettre, Evariste Mabi Mulumba rappelle à Ngoy Boliya en se basant sur son article 4 que « la durée maximale pour l’obtention d’un diplôme de DEA/DES est de deux ans alors que celle conduisant à l’obtention du diplôme de doctorat est de trois ans minimum et de cinq ans maximum ». Le directeur soutient que même la charte de l’école doctorale (Vade-Mecum) à laquelle le recteur fait allusion n’autorise pas la soutenance d’une thèse de doctorat au bout de deux ans. « Celle-ci parle de 6 semestres. Ce qui correspond à trois ans révolus comme le stipule l’arrêté ministériel portant normes d’opérationnalisation des enseignements du 3ème cycle », démontre Mabi Mulumba.
Par sa lettre du 13 décembre 2017 au professeur François Kabuya Kalala, promoteur de la thèse de Matata Ponyo dans laquelle il était question des observations sur l’urgence de déposer le procès verbal attestant la finalisation de la thèse, sur le respect de la composition du jury et sur le respect de la durée de soutenance, le directeur démissionnaire de l’école doctorale de l’UPC avait alerté son collègue que la Faculté d’Administration des Affaires et Sciences Economiques devra se préoccuper au plus haut point de la crédibilité de l’Université Protestante au Congo, de son école doctorale et surtout des apprenants sortis de son sein. « Ces observations ne remettent nullement en cause les qualités du doctorant mais nous devons à notre niveau éviter, vu sa stature, que des dysfonctionnements par ailleurs faciles à évacuer, ne ternissent l’image de l’Université, de son école doctorale et voir de l’apprenant lui-même », peut-on lire en conclusion de cette lettre.
Le professeur Mabi Mulumba affirme que le procès-verbal attestant la finalisation de la thèse ne lui a jamais été déposé contrairement à ce que le recteur a écrit dans sa lettre d’accusé de réception et que même la composition du jury n’a pas respecté les prescrits de l’arrêté ministériel qui voudrait que le jury de thèse de doctorat soit constitué du promoteur de la thèse, d’un membre du Comité d’encadrement, d’un membre extérieur au département, d’un membre extérieur à la Faculté, de trois membres extérieurs à l’établissement. Et que tous ces membres du jury doivent être revêtus du grade de professeur, professeur ordinaire ou encore professeur émérite. « Comme vous le constatez, les professeurs associés ne sont pas autorisés à faire partie du jury. Tous vos autres commentaires sont pour moi superflus », tacle le professeur sénateur. D’ailleurs au sujet des membres extérieurs, www.scooprdc.net apprend que deux d’entre-eux étaient des conseillers occultes du doctorant Matata Ponyo, alors premier ministre de la RDC.
Mabi Mulumba met sa main à couper pour que le recteur lui prouve qu’il tenait coûte que coûte à figurer dans le jury de Matata Ponyo. « Monseigneur le Recteur, lorsque l’on insiste sur l’éthique, il est indiqué de commencer soi-même par donner l’exemple et ne pas diffuser d’informations inexactes. Je n’ai jamais cherché à faire partie du jury de monsieur Matata Ponyo comme vous l’affirmez sans preuve. Cette affirmation est indigne de vous. Je vous défie de me citer les noms des personnes interposées auxquelles vous faites allusion ». En effet, dans sa lettre d’accusé de réception, le professeur Ngoy Boliya insinuait que la plupart des demandes de Mabi Mulumba, par le truchement de diverses personnes interposées, n’allaient que dans le sens d’intégrer le jury. Faute d’y parvenir, accuse-t-il, Mabi a décidé de brûler la maison.
Face à ce déballage du professeur Mabi Mulumba, Monseigneur le recteur va-t-il aussi réagir ? Matata a su bien diviser les imminents professeurs qui s’étalent sur la place publique et dans tout ça c’est l’image de la prestigieuse UPC qui est ternie davantage après une série des scandales, entre autre celui du député national Zacharie Bababaswe, qui dit-on a parachevé son premier cycle de formation en Droit, mais a été incapable d’établir la différence entre un avocat et un avocat général. Beaucoup d’observateurs craignent que cette université devienne une poubelle scientifique où les diplômes sont politiquement attribués aux dignitaires du régime. D’autres plaident pour le remplacement du recteur qui décidément a une durée de mandat inconnu et ça fera 25 ans cette année qu’il chapote cette institution d’enseignement universitaire. N’est ce pas là l’usure du pouvoir ? Cette longévité à la tête de cette université visiblement lui a fait perdre le sens de la rigueur et le baignerait actuellement dans la complaisance.
Owandi.