Loin de s’avouer faiblard et vaincu, le clergé catholique de Kinshasa a donné de la voix, vendredi 09 février, lors de la célébration de culte en mémoire des victimes de la marche pacifique du 21 janvier à Kinshasa. « Il est vrai que nous nous sommes rassemblés aujourd’hui pour prier en faveur de ces derniers morts dont une fille qui se préparait à se consacrer à Dieu pour servir les pauvres. Il est aussi vrai que lorsque nous pleurons ces morts du 21 Janvier, nous sentons remonter en nous, les douleurs causées par les tueries du 31 décembre 2017 et le massacre de beaucoup d’autres congolais (plus de Huit millions parmi lesquels les évêques, les prêtres, les religieux et les religieuses) qui sont morts partout dans notre pays depuis le début de la tragédie que nous situons en 1997. Nous sommes venus prier pour que le sang de ces dernières victimes mêlé au sang de nombreux congolais massacrés innocemment ne reste pas sans féconder les efforts de survivants que nous sommes », déclarent les prêtres, les religieuses et religieux de la ville de Kinshasa.
« Oui, lorsque nous pleurons et prions pour ces dernières victimes, nous nous rappelons aussi l’amertume des souffrances morales et physiques que le pouvoir en place fait subir aux chrétiens et aux prêtres depuis le 31 décembre 2017. Nous sommes devenus la cible de leur terreur. Une terreur jamais connue dans cette ville qui est allée jusqu’à déshabiller publiquement un prêtre, des prêtres sont fréquemment molestés, insultés même à travers les médias de l’Etat, brutalisés et kidnappés en plein exercice de leurs services pastoraux, etc. Des cures et couvents constituaient des endroits les plus sécurisants sont devenus des lieux d’insécurité. Quel sacrilège et quelle indignité pour un pays majoritairement chrétien ».
Rappelant aux autorités politico-administratives qu’ils ne sont pas des politiciens et de ce fait ils ne sont ni à gauche ni à droite, mais ils ont la mission prophétique de veiller sur la bonne marche de la cité. Une mission qui, selon eux est légalement connue de tout politicien. « Malgré les grandes études que fait le prêtre, il ne se dérobe pas de la mission que le Christ lui a confiée. Il est toujours à coté du peuple. C’est ainsi que le prêtre peut s’exprimer sur la situation actuelle avec beaucoup de certitudes. Le prêtre voit la lumière où vous voyez l’obscurité, il voit l’avenir où vous voyez le néant, il voit l’espérance quand vous parlez de doute, il est sans peur quand vous vous versez dans l’anxiété, il s’ouvre à l’amour lorsque vous vous enfermez dans la haine », déclare ce corps du clergé de Kinshasa avant d’ajouter : « Nous portons le combat de la libération du Congo à son niveau mystique. Nous voudrions pleurer sur ce pays la République Démocratique du Congo et sur ses dirigeants ainsi que leurs alliés locaux et internationaux. Nous versons nos larmes en notre qualité de Prêtre, de Prophète et de Roi. Nous sommes des milliers de Congolais qui avons fait le sacrifice de notre vie à Dieu pour le service de plus pauvres. Nous œuvrons sans but lucratif et nous nous dévouons à offrir tous les jours des sacrifices spirituels et des services sociaux dans des conditions inacceptables pour le bien de ce pays ».
Confiants et déterminés, les prêtres, les religieuses et religieux de Kinshasa recommandent aux autorités politico-administratives d’éviter toute sorte de stratégie inspirée par la peur, la malveillance, la haine, l’égoïsme, la déloyauté. « Si, en effet, vous les dirigeants sentez l’obligation de réprimer dans la violence le droit du peuple à la manifestation, tolérez aussi que le prêtre ait l’obligation de dénoncer cette barbarie. Nous sommes conscients de la confiance que vous faites à vos armes pour réprimer les pauvres qui crient leur souffrance et leur désolation. Mais soyez en sûrs, à vous les armes et à Dieu la victoire ».
Tout en appelant les autorités politico-administratives à la conscience, le corps du clergé les conseille de ne pas protéger le pourvoir par des actes de sacrilège et de profanation et les invite pour leur délivrance, de passer au confessionnal. « Il ne faut pas chercher à nous intimider par des mensonges dans les médias, les appels de menaces à la mort, des arrestations arbitraires, des projections pour nous tendre des pièges afin qu’on vous laisse tranquille. Il faut plutôt instaurer la justice et le droit. Vous verrez que vous serez satisfait et fier de vos œuvres. Travaillez pour le bien-être de tous et non pour l’argent », interpellent-ils les autorités congolaises en leur signifiant leur soutien aux marches pacifiques organisées par le Comité Laïc de Coordination (CLC) dont celle convoquée le 25 février prochain pour dire non à la dictature.
Georges Ilunga.