Le gouverneur du Haut-Katanga déchu par l’Assemblée provinciale et réhabilité par la Cour constitutionnelle n’est pas encore essoufflé. Jean-Claude maintien de l’air dans ses poumons pour son marathon juridico-politique. N’ayant pas eu gain de cause auprès de la Cour d’Appel qu’il avait saisi en intervention volontaire contre la publication des résultats définitifs de l’élection d’un Gouverneur et Vice-Gouverneur du Haut-Katanga, il vient de saisir, le 12 septembre dernier, la Cour suprême de justice. L’accusé : la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Le jusqu’au-boutiste Kazembe s’oppose à la validation de l’élection de Célestin Pande Kapopo comme gouverneur du Haut-Katanga. En rappelant à la Cour Suprême les arrêts de la Cour constitutionnelle dans l’affaire qui l’oppose à l’Assemblée provinciale, d’ailleurs qui n’appellent aucun recours, qui sont immédiatement exécutoires et qui s’imposent à tous, Jean-Claude Kazembe fait voir qu’il n’y a pas et il n’y avait pas vacance à la tête de la province au moment de l’organisation de cette élection.
Les proches du gouverneur en ballottage reprocheraient à la Cour d’appel, entre autre, le refus de nommer un rapporteur, de notifier les parties au procès moins encore de donner la parole aux avocats de l’appelant. Qu’est ce qui justifierait cette sourde oreille de la cour d’appel ? En effet, les proches de Kazembe accusent la Cour d’avoir empoché avec avidité 400 mille dollars pour proclamer en trombe les résultats définitifs de l’élection du Gouverneur en ignorant les arrêts de la Cour constitutionnelle. Ils affirment que la même tentative de corruption a été faite auprès du Président de la Cour constitutionnelle par le gouverneur élu Célestin Pande. Ce dernier aurait apporté 200 mille dollars à Benoit Lwamba qui aurait refusé l’enveloppe en ces termes : « nous sommes tous derrière notre Président, le Raïs Joseph Kabila, va travailler, sois calme ». Benoit Lwamba n’aurait pas voulu cautionner l’humiliation dont fait l’objet sa haute institution de la part des politiciens.
Les inquiétudes des juristes
Que peuvent attendre les avocats de Kazembe de la cour suprême de justice ? Difficile de supputer pour l’instant. Toutefois, certains hommes du monde de Droit congolais soupçonnent déjà le président de la Cour Suprême de justice Jérôme Kitoko Kimpele d’être trop soumis à Néhémie Mwilanya, directeur de cabinet du président de la République. Ce qui biaiserait en avance le procès, s’il y en aura un. Mais, ils se consolent tout de même que le dossier Kazembe qui vient de lui parvenir est une patate chaude entre ses mains face aux prescrits doctrinaux. Ce qui ne réconforterait pas d’autres juristes d’autant plus que la Cour d’appel de Lubumbashi s’est montré rebelle vis-à-vis de la Cour constitutionnelle. En effet, dans tous les pays normaux, une Cour d’appel est tenue par les arrêts de la cour constitutionnelle, qui du reste s’imposent à toutes les juridictions administratives et judiciaires du pays. En publiant les résultats définitifs d’une élection de gouverneur dont l’élément déclencheur a été invalidé par la Cour constitutionnelle, la Cour d’appel de Lubumbashi a officialisé sa politisation et désacralisé la hiérarchie des cours et tribunaux, pourtant un élément essentiel de l’ordre juridique d’un État.
Le silence de Joseph Kabila inquiète.
Le feuilleton désagréable et déshonorant qui se déroule dans le Haut-Katanga entre Jean-Claude et la CENI est l’œuvre combinée du PPRD-MP. A ce jour, le président Joseph Kabila n’a rien dit dans ce dossier. Il n’a pas levé le ton contre Jean-Claude Kazembe tout comme il n’arrête pas la folie du PPRD et de la MP de se placer en marge et au-dessus de la loi. Que signifie son silence, lui étant l’autorité morale des protagonistes qui ont mis la justice dans les sales draps ? Jusqu’où, lui le premier magistrat du pays, laissera-t-il pourrir cette situation de folie de grandeur des uns et des autres au sein de sa famille politique ? Autant d’inquiétudes pour les observateurs de la scène politique congolaise.
Agnalo Agnade