Investi le 16 mai dernier par l’Assemblée nationale, le premier ministre Bruno Tshibala a totalisé ce samedi 26 aout, cent jours à la Primature. Dans son discours d’investiture, l’ancien Secrétaire adjoint de l’UDPS et porte-parole du Rassemblement de l’opposition s’était fixé quatre objectifs avec son gouvernement d’union nationale. C’est notamment œuvrer pour l’organisation des élections crédibles, libres, transparents et apaisés dans les délais convenus ; arrêter la dégradation de la situation économique du pays ; améliorer les conditions de vie de la population ; et restaurer la sécurité des personnes et de leurs biens sur l’ensemble du territoire national.
Bien que cent jours soient moins suffisants pour évaluer les actions de Bruno Tshibala, mais les indices de jugement de matérialisation démontrent que les quatre objectifs du premier ministre ont de la peine à se réaliser. S’agissant d’abord de l’organisation des élections, il est clair avec les béquilles d’arguments lui prêtées par la Ceni et la Sadc, que Bruno Tshibala ne les organisera plus dans les délais convenus dans l’accord du 31 décembre 2016 dont il est légitimement et légalement l’émanation. Cet accord ne prévoit pas les élections présidentielle et législatives au-delà du 31 décembre 2017. Donc, l’organisation des élections dans les délais convenus comme par lui déclaré ne constitue plus une mission prioritaire du gouvernement Tshibala. Et il est incertain même que ce soit lui qui les organiserait.
Quant à la stabilisation et la relance de l’économie nationale, c’est encore un champ de bataille pour Bruno Tshibala. Il a du mal à rétablir les équilibres du cadre macroéconomique et entreprendre résolument la relance de la production nationale. Bien qu’il lutte contre l’inflation monétaire et manifeste la bonne volonté de juguler la fraude douanière aux frontières, les économistes ne voient pas Bruno Tshibala maintenir la discipline budgétaire et éviter des déficits de trésorerie. Les aboiements de la Banque Centrale du Congo aux miniers de rapatrier 40% de leurs recettes au pays, sont encore loin de produire des effets escomptés.
Concernant l’amélioration des conditions de vie de la population, c’est la patate chaude dans la main de Bruno Tshibala. La grogne caractérisée par des mouvements de grève et d’autres en vue dans plusieurs domaines (santé, enseignement supérieur et universitaire, magistrature, …) en témoigne. Le premier ministre n’est pas capable de payer les agents et fonctionnaires de l’Etat au taux de 1420FC pour un dollar, comme promis par lui-même. L’augmentation décidée de 20.000FC (soit 13$) sur le salaire de chaque fonctionnaire et agent de l’Etat à partir de ce mois d’aout, ne traduit pas le réajustement annoncé de ces salaires qui ont perdu au moins 40% de leur pouvoir d’achat. Une promesse non tenue qui irrite les grévistes…Pire encore, dans sa propre cour, c’est un malaise caractérisé à la Cellule de communiction. Les confrères journalistes qui y travaillent accusent trois mois d’arriérés de salaires…
Avec les difficultés qu’il rencontre dues à l’asphyxie financière lui infligée par le directeur de cabinet du président de la République, Néhémie Mwilanya, qui semble être le véritable premier ministre, on ne voit pas Bruno Tshibala dans un futur proche faciliter comme promis dans son discours d’investiture, l’accès des enfants, garçons et filles, à l’alimentation saine et équilibrée, à l’éducation et aux soins de santé de qualité et de proximité, à travers des cantines scolaires, les transferts monétaires, la gratuité de l’enseignement primaire et la subvention des soins de santé.
S’agissant enfin de la restauration de la sécurité, bien que le phénomène Kamuina Nsapu ait baissé d’intensité, Bruno TShibala a encore du pain sur la planche avec les Bundu dia Mayala à Kinshasa et dans le Kongo Central, la FRPI en Ituri et les nébuleux groupes mai-mai dans tout l’Est du pays. S’applaudir très tôt dans ce domaine sécuritaire où ses prédécesseurs ont échoué, y compris le célèbre Augustin Matata Ponyo, relèverait de l’eschatologie.
Somme toute, des bonnes ou mauvaises langues concluent à tort ou à raison que les cents jours de Bruno Tshibala à la Primature lui ont permis de se taper rapidement une petite fortune. Il aurait acheté en trois mois deux appartements dans le luxueux immeuble CTC Residency, voisin du ministère du Portefeuille, sur l’avenue du Port. Il aurait également acheté au prix triple la parcelle qu’il louait à Lemba, en souvenir de souffrance de sa vie.
Ginno Lungabu