Sur les six listes définitives des candidats gouverneurs et vice-gouverneurs du Sud-Kivu, publiées par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), figure celle de Gustave Bagayamukwe, avec comme colistier Thomas d’Aquin Uthewasso Kyamusugula. Ils sont des candidats indépendants. Seulement, cet ancien cadre de la Banque Centrale et président de l’Association pour le Défense des Intérêts de Bukavu (ADIB) croupit dans la prison de Ndolo pour des faits insurrectionnels. Il avait été arrêté à Uvira le 10 février 2013 et transféré à Kinshasa à l’agence Nationale de Renseignements (ANR) avant d’être conduit à la Prison militaire de Ndolo. Gustave Bagayamukwe, avait créé à la mi-janvier à Uvira, un mouvement rebelle dénommé l’Union des Forces Révolutionnaires du Congo (UFRC). Une coalition de douze groupes armés rebelles qui avaient la détermination de renverser le président Joseph Kabila, selon la déclaration de Gustave Bagayamukwe, avant son arrestation.
Malgré qu’il soit amnistié par le président Joseph Kabila dans la vague des amnistiés de février 2014, Gustave Bagayamukwe est toujours détenu à la Prison militaire de Ndolo. Mais cela ne l’a pas empêché de postuler comme gouverneur de province. Selon son avocat, Me Peter Ngomo, c’est sur demande insistante des populations Sud-kivutiennes fatiguées d’avoir des politiciens sans notions de bonne gouvernance à la tête de leur province. C’est ainsi que dans une correspondance adressée jeudi 17 aout au Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur, Emmanuel Shadary, l’avocat de Gustave Bagayamukwe lui demande que son client soit autorisé de se rendre à Bukavu pour battre campagne comme tous les autres candidats auprès de ses électeurs que sont les députés provinciaux. Cette campagne débute ce mardi 22 aout.
Mais certains observateurs prédisent déjà une fin de non-recevoir à cette demande de Me Peter Ngomo. Pour la simple raison que la Majorité présidentielle ayant aligné dans cette province le ticket Claude Nyamugabo – Hilaire Kasusa, le VPM Emmanuel Shadary appartenant à ce regroupement politique, ne commettrait pas l’erreur de laisser partir un candidat potentiellement concurrent pour battre campagne. Mais d’après l’analyse d’autres observateurs, l’équation la plus difficile ne réside pas surtout en la présence de Gustave Bagayamukwe à Bukavu mais plutôt en la finalité de cette élection au cas où les députés provinciaux jetteraient leur dévolu sur lui-même sans qu’il soit physiquement à Bukavu. Qu’adviendrait-il ? Un gouverneur élu mais détenu à la prison de Ndolo ? Ça sera sans doute une première dans l’histoire de la RDC.
Son avocat qui craint que les décideurs du pays créent inutilement une nouvelle jurisprudence, soutient que son client a un casier judiciaire vierge. Il n’a jamais été condamné et qu’aujourd’hui il n’y a aucune charge qui pèse sur lui. Donc, c’est un citoyen qui jouit de la plénitude de ses droits civils et politiques. Sinon, il ne serait pas retenu candidat. Me Peter Ngomo estime qu’au cas où Gustave Bagayamukwe sera élu tout en étant détenu en prison, le pouvoir central sera devant un fait accompli. Il s’interroge : est-il concevable qu’on ait un gouverneur élu en prison ? Et c’est la même interrogation que se posent maints observateurs qui en ajoutent d’autres : pourquoi garder en détention quelqu’un qui a été amnistié par le président de la République ? Qui défie ainsi le président Josep Kabila ? les vraies réponses sont dans le camp présidentiel.
Agnalo Agnade