Le samedi 03 février, l’ancien premier ministre Adolphe Muzito était l’invité de Grande Interview qui passe sur Radio Okapi. Celui qui est devenu champion dans la rédaction des « Tribunes » s’est entretenu sur plusieurs questions en rapport avec la marche du pays, notamment sa propre gestion critiquée par beaucoup de congolais, le processus électoral, la démocratie, les finances…
A la question de donner sa lecture sur la répression des marches des catholiques le 31 décembre 2016 et 21 janvier 2018, Adolphe Muzito répond sans ambages : « les Catholiques doivent être écoutés et ils doivent continuer à créer les rapports de force. La société a besoin des corps sociaux, des corps intermédiaires qui font la jonction entre le sommet et la base et qui, quelques fois aident le peuple à comprendre les difficultés des gens d’en haut. On ne peut pas avoir une nation forte sans des églises fortes aussi bien sur le plan spirituel atemporel et temporel. On ne peut pas avoir un pays fort sans syndicat fort. On ne peut pas avoir un président respecté s’il n’est pas assis sur des corps sociaux solides qui le font respecter sur le plan diplomatique. On ne peut pas avoir un Etat fort si on n’a pas les trois institutions qui se contrôlent mutuellement, c’est-à-dire le législatif, l’exécutif et le judiciaire. Tout ça c’est vide… Voilà pourquoi notre pays est faible et avec son président ».
Pour ce haut cadre du Parti Lumumbiste Unifié (PALU), c’est bon pour la RDC qu’il y ait une église qui fait pression sur le gouvernement pour lui dire : « attention, ce n’est pas vous le souverain. Vous gérez par délégation du souverain et on peut vous déloger. Mais que le pouvoir conscient de cela dise attention je ne ferai plus telle bêtise ». L’ancien premier ministre se dit étonné que le Gouvernement ne se soit pas fait pardonner en expliquant par exemple au peuple congolais pourquoi en 2016 il n’a pas organisé les élections ! Et là vous vous adressez au président Kabila ?, rétorque le journaliste. Réponse de Muzito : « A lui-même, à moi-même, à nous tous. Ayons le sens de redevabilité. Si vous ne rendez pas comptes, ce que pour vous ce peuple n’existe pas. Et c’est très grave ».
Sceptique sur l’organisation des élections le 23 décembre 2018…
Malgré le calendrier publié par la CENI, l’ancien premier ministre PALU déclare sans mâcher les mots, ne pas croire à la tenue des élections. Non pas par mauvaise volonté politique, mais par manque des moyens financiers. « On dit que nous allons financer les élections avec nos propres ressources. Quel est le budget de l’Etat ? C’est cinq milliards de dollars dont quatre milliards de ressources propres. Le milliard de l’extérieur il ne faut pas compter, ça ne vient jamais. Le niveau de mobilisation des recettes mensuelles c’est trois millions de dollars. Et l’essentiel va aux salaires et il n’y a pas de ressources suffisantes pour qu’en six mois on décaisse cinq cent millions dont la CENI a besoin ».
Pour être dans le délai, l’ex-premier ministre conseille que les autorités de Kinshasa aient l’humilité de demander un soutien à la Communauté internationale. « Moi je suis contre ce concept de souveraineté, dans la pauvreté. C’est de l’imposture », se révolte Adolphe Muzito avant d’ajouter : « La souveraineté se construit dans l’interdépendance des Etats et des économies. Ce n’est pas seul isolé qu’on peut être souverain, en n’ayant même pas d’armée, en n’ayant pas une monnaie stable ». Adolphe Muzito ne se gêne pas pour plaider en faveur d’un plan d’aide international à la fois pour la transition et pour le mandat prochain. Sinon, après les élections pourvu qu’elles aient lieu, sera égal avant les élections, prévient-il.
Georges Ilunga